Bolly&co Magazine

La critique de : Lion (★★★★★)

19 mars 2017
critique film Lion Les amis ! C'est le printemps du cinéma, profitez-en ! C'est dans ce cadre que je suis enfin allée voir Lion, co-production anglo-australienne de Garth Davis avec Dev Patel, Rooney Mara et Nicole Kidman dans les rôles principaux. Lorsque j'ai su que le métrage cumulait de multiples nominations aux Oscars, j'ai d'abord ressenti une profonde envie de le découvrir puisque, soyons honnêtes, dès qu'une œuvre évoque de près ou de loin l'Inde, elle m'intéresse ! D'un autre côté, les réalisateurs occidentaux qui parlent d'Inde peuvent avoir, parfois, ce regard très dédaigneux sur le pays, préférant illustrer tout ce qui fait sa faiblesse plutôt que de mettre en exergue son incroyable richesse.

Mais Lion se démarque.



Saroo (Sunny Pawar) est adopté à l'âge de 5 ans par un couple d'australiens : John (David Wenham) et Sue Brierley (Nicole Kidman). 25 ans plus tard, le jeune homme (incarné par Dev Patel) ne parvient pas à s'accomplir tant il est hanté par le souvenir de sa mère biologique (Priyanka Bose) et de son frère aîné Guddu (Abhishek Bharate), C'est ainsi qu'il tente de se remémorer d'où il vient sur la base de ces fragments de souvenir, et avec l'aide du logiciel Google Earth...

Lion est un bijou de sensibilité. Le cinéaste nous fait littéralement entrer dans la peau de son héros, à tel point que l'on est en mesure de ressentir son désarroi, sa douleur et son besoin de partir à la recherche de ses racines. J'ai eu le cœur qui se serrait dès lors que Saroo évoquait ses tourments. Il s'est mis à battre la chamade lorsqu'il était sur le point de retrouver d'où il venait. J'ai angoissé tout autant que lui à la perspective qu'il ait parcouru tout ce chemin pour ne pas retrouver sa mère. La réalisation est telle qu'elle nous permet d'être en totale empathie avec les personnages. Plus encore, on parvient à être en projection et à créer du lien avec eux, là où ils ne partagent manifestement rien de commun avec nous. J'ose imaginer l'impact de ce métrage pour un spectateur ayant lui-même un passif d'adoption ou qui aurait également perdu de vue un proche...

Lion a été promu en France comme le nouveau Slumdog Millionaire... Permettez-moi de m'insurger ! Le problème des gros distributeurs français, c'est qu'ils se laissent facilement aller aux raccourcis pour vendre leurs produits. Dans le cas de Lion, c'est le groupe M6 qui s'est positionné pour proposer l'œuvre au public français. Mais associer Lion à Slumdog Millionaire est une erreur de communication absolument grotesque tant les deux films n'ont en commun que leur acteur principal et le fait que la narration soit contextualisée en Inde. Pour le reste, ce serait totalement réducteur de vouloir associer les deux œuvres tant elles possèdent chacune une identité qui leur est propre, rayonnant merveilleusement chacune à leur manière.

J'ai chialé. Du début à la fin. Et c'est grâce aux deux comédiens qui interprètent Saroo aux différentes étapes de sa vie. Parlons d'abord de Dev Patel, pour lequel j'ai un béguin sans limite depuis la série Skins, amplifié par l'incontournable Slumdog Millionaire... L'acteur de 26 ans sublime son jeu à chaque expérience au cinéma, et délivre ici une prestation magistrale en jeune homme déboussolé et écorché vif, qui a besoin de retrouver ses racines pour aspirer à la paix intérieure. Nommé aux Oscars pour sa performance, il remportera le BAFTA Award du Meilleur Second Rôle Masculin.Je n'ai pas vu Moonlight, je ne peux donc nullement contester la victoire de Mahershala Ali aux Oscars. Pour autant, je peux me permettre d'affirmer que Dev méritait largement cette récompense tant il m'a cueilli. Tout en lui est expressivité, émotion et générosité. Je n'ai donc pas fini de craquer pour lui...

Mais la trouvaille de Lion, c'est le petit Sunny Pawar. Repéré dans une école pour enfants défavorisés à Mumbai, Sunny fait sa première expérience devant la caméra avec ce rôle majeur. Ses grands yeux noirs, son sourire et surtout la maturité avec laquelle il porte chacune de ses scènes sont juste incroyables. Sunny est adorable, mais ce n'est pas ce qu'on retient. Sunny est Saroo, du début à la fin. Désormais âgé de 8 ans, le jeune acteur a une belle carrière qui l'attend, lui qui ne parlait pas un mot d'anglais lorsqu'il a démarré le tournage de Lion.

Nicole Kidman a un rôle plus limité mais est impeccable dans la peau de Sue. Je pense qu'elle a tout de même constitué l'argument marketing du métrage pour sa large distribution en salles, d'où le fait qu'elle soit à ce point mise en avant dans les démarches de promotion. Rooney Mara et David Wenham soutiennent parfaitement Dev dans leurs scènes communes. Mentions spéciales à Divian Ladwa qui incarne Mantosh, le frère adoptif torturé de Saroo ainsi qu'à Priyanka Bose, brillante dans la peau de Kamla, la mère naturelle de ce dernier.

S'il y a une seule chose qui m'a dérangé, c'est le doublage français. En effet, celui-ci nous fait totalement passer à côté de la subtilité des situations par lesquelles passe Saroo lorsqu'il se perd. L'enfant originaire du Madhya Pradesh parlait alors hindi. C'est ainsi qu'en arrivant à Calcutta, il est d'autant plus perdu lorsqu'il se retrouve face à des gens qui ne parlent que le bengali. C'est dommage que le doublage n'ait pas laissé la place à ces échanges dans les langues indiennes, qui viennent justement souligner les épreuves par lesquels passe le héros. De fait, si vous avez l'occasion de le voir en version sous-titrée, je vous invite à la préférer à la copie doublée.

Bref, j'ai payé 4 euros pour vivre un instant de cinéma saisissant, porté par sa distribution prodigieuse et magnifiée par la musique de Dustin O'Halloran et Hauschka, avec la sublime chanson de Sia « Never Give Up » qui vient parfaitement conclure ce joyau en pellicule. Le récit de Saroo est une histoire vraie. Et Lion est un magnifique hommage à la quête identitaire de ce jeune homme. Ça fait du bien de pleurer pour des films d'une telle puissance. Et pour couronner le tout, je suis encore plus amoureuse de Dev Patel.
LA NOTE: 5/5
★★★★★
mots par
Asmae Benmansour-Ammour
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"Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même."