Bolly&co Magazine

Agilane Pajaniradja, le fondateur d'Aanna Films.

22 juin 2018
interview Agilane Pajaniradja Aanna Films Ça fait quelques années que ça traînait en longueur. On pensait d’abord le rencontrer en janvier 2017 dans le cadre du Paris Images Tradeshow. Mais il était souffrant. Elodie espérait ensuite s’entretenir avec lui lors de l’édition 2017 du Festival des Cinémas Indiens de Toulouse. Encore manqué ! Pire qu’une star de cinéma, décidément ! Mais cette année, c’était la bonne. Après l’avoir croisé furtivement en 2017 lors de la projection exceptionnelle de Vikram Vedha, nous avons enfin pu nous poser avec Agilane Pajaniradja, directeur de la société de distribution Aanna Films. Entretien sérieux et solennel en perspective ? Que nenni !

Conversation autour d’un cheesecake.



Puisque nous avons partagé le Festival des Cinémas Indiens de Toulouse. avec lui. Nous avons au passage découvert sa passion, sa sensibilité, sa sincérité et sa curiosité pour les cinémas indiens. Il faut dire qu’exceptionnellement, il avait laissé son costume de chef d’entreprise au placard pour revêtir celui, plus confortable, de cinéphile. Cette interview date d’avril dernier, mais on profite de la sortie toute récente de son dernier né, Race 3, pour vous faire découvrir l’homme qui se cache derrière la bannière Aanna Films. Et on vous prévient : vous risquez d’être très surpris…

Alors déjà, merci de nous accorder un peu de ton précieux temps. Avant toute chose, comment tu as initié le projet Aanna Films?

Agilane Pajaniradja : Beaucoup le savent déjà, ça a commencé du fait que j’avais envie de voir des films indiens en salles de cinéma. Il n’y avait pas de possibilité dans le sens où je l’entends, c’est-à-dire qu’il y avait des films indiens qui étaient disponibles à l’époque à La Courneuve mais les conditions de projection ne me convenaient pas. Du coup, je voulais que de vraies salles puissent diffuser les films indiens. Je suis allé voir plein de gens pour qu’ils le fassent. Mais personne ne voulait le faire. En attendant, j’avais fait des études de marché pour savoir comment ça fonctionnait. Et vu que personne d’autre que moi ne voulait le faire, je me suis lancé.

Donc tu as ouvert ta boîte,
c’est ça ?


AP : J’ai créé une société. Initialement, c’était via une association. Je ne faisais que des projections ponctuelles. Mais je voulais aller plus loin et j’ai donc créé Aanna Films en 2009. Cela m’a pris plus d’un an et demi pour convaincre une salle de cinéma. Le premier film que j’ai distribué, Delhi Belly (avec Imran Khan, ndlr), a fait un flop. Mais c’était un succès dans le sens où sortir un film indien en France en même temps qu’en Inde de manière légale avec des sous-titres en français constituait en soi un challenge. Et ce challenge-là, on l’a relevé avec Delhi Belly. Le premier succès financier, c’était notre deuxième film, 7ème sens (7aum Arivu avec Surya, ndlr), que nous avons sorti en fin d’année 2010.

Quand tu disais que tu voulais voir des films indiens, quelle était ta volonté ? Quel genre de films indiens tu souhaitais rendre accessible ?

AP : A l’époque, j’avais vraiment envie de voir des films populaires tamouls. Dans mon évolution de cinéphile, j’ai commencé à aimer le cinéma avec les films de Mani Ratnam. J’avais alors 12 ou 13 ans. Ensuite, j’ai enchaîné beaucoup de films tamouls. Puis je me suis intéressé aux films populaires français comme les Visiteurs par exemple. Et ma professeure de français du lycée m’a initié au cinéma d’auteur comme les films de Jean-Luc Godard, d’Agnès Varda… C’était très difficile au début avec ce cinéma-là. C’est un choc culturel tel que je n’arrivais pas à considérer que c’était des films. A la fin de chaque projection, la question qui me dévorait, c’était « On vient de voir un film, là ? » (rires). J’en étais là. Petit à petit, j’ai compris beaucoup de choses. J’ai compris pourquoi je n’arrivais pas à apprécier ces films qui sont considérés comme des œuvres culte. Je me suis remis en question. Pour entrer dans le détail, c’est simple : il y a une manière de manger du biryani et une manière de manger une quiche-lorraine. On ne peut pas attendre d’une quiche-lorraine ce qu’on attend du biryani. J’ai donc appris à distinguer le cinéma indien du cinéma occidental. Le cinéma populaire du cinéma d’auteur. J’ai pu comprendre que c’étaient des cuisines différentes. Je ne peux pas attendre de Jean-Luc Godard ce que j’attends de Mani Ratnam. Ce cheminement intellectuel m’a permis de mieux apprécier les films français au point de les aimer.

Quand je suis arrivé en France, j’avais l’embarras du choix avec tous les films du monde qui sont diffusés à Paris. J’ai littéralement abandonné le cinéma indien, plus particulièrement le cinéma tamoul que je dépréciais alors. J’étais dans un rejet du cinéma tamoul parce que je trouvais que ce qui se faisait ailleurs était bien plus puissant. Mais au bout d’un moment, ce cinéma d’auteur occidental a fini par m’ennuyer. Et par hasard, je suis tombé sur des films tamouls qui étaient sortis à l’époque et que j’avais refusé de voir parce que j’estimais que c’était du n’importe quoi. Mais j’y ai retrouvé cette joie de vivre, cette énergie… Et j’ai réalisé qu’effectivement, tous les films tamouls ne sont pas niais et il y en a qui ont leur place dans le panorama du cinéma du monde. Même si ce sont des films populaires, il y en a de très bons qui ont toute leur légitimité. Et j’en avais besoin à ce moment-là. Ça faisait quelques années que je vivais en France, j’étais seul. Ça a pu être difficile à un moment. Et donc, voir des films avec cette joie de vivre a été très réconfortant pour moi. C’est ainsi que je me suis remis à voir des films tamouls. A l’époque, je devais me rendre à La Courneuve (au cinéma Pantin, ndlr). Mais pour moi, c’était inacceptable de voir un film là-bas. J’ai commencé à développer des séances uniques, d’abord pour répondre à mes propres besoins. Ça s’est transformé en une volonté de satisfaire d’autres personnes qui m’entouraient et qui adoraient un certain cinéma. On en était encore au stade associatif. Mais financièrement, ça ne fonctionnait pas puisqu’on n’était pas en lien direct avec les distributeurs indiens et on payait le prix fort pour une bobine. C’est ainsi que j’ai créé Aanna Films pour montrer au public des films tamouls que j’aurais adoré voir moi-même.

Quels paramètres vont t’amener à choisir un film pour le distribuer
en France ?


AP : Très clairement, Aanna Films est une société de distribution de films qui a l’obligation de bénéfice. Sinon, elle ne peut pas exister. Je ne peux donc pas payer le prix fort pour un film dont je ne suis pas sûr qu’il sera rentable. Mais d’un autre côté, j’ai aussi pris goût au fait de rendre heureux les autres. C’est-à-dire que j’étais content de voir des films que j’attendais au même titre que d’autres gens ont envie de voir certains films. Et le fait de leur permettre de les voir et de leur procurer cette joie, ça me rend heureux. J’étais dans l’identification avec ces gens même si le film en question ne me plaisait pas personnellement. L’émotion est la même, au final. Donc très tôt, le but n’était plus de distribuer les films que j’avais envie de voir. J’ai certes créé la société dans cette optique, mais rapidement, les choix des films n’ont pas été orientés par mes goûts. Quand j’ai envie de voir un film, je le vois, je ne le distribue pas. Je distribue un film quand, d’une part, c’est rentable. D’autre part, quand c’est susceptible de satisfaire un maximum de personnes. Donc il y a beaucoup de films que j’ai sorti à la demande populaire mais que je n’ai même pas vu moi-même.

interview Agilane Pajaniradja Aanna Films C’est intéressant puisque d’un côté, tu as cette volonté de répondre à la demande en diffusant des blockbusters. Mais Aanna Films a aussi défendu des plus petits métrages, notamment en langue punjabi. Pourquoi tu te lances là-dedans ?

AP : Mais tu peux aussi remarquer que les sorties de ces films sont plus modestes. Je dois trouver l’équilibre entre le prix d’acquisition, la demande et l’intérêt du film en tant qu’œuvre artistique. On ne sort jamais les films de la même manière. Chaque film a une histoire derrière lui qui lui appartient et qui lui est propre. D’ailleurs, dans l’acquisition, dans le marketing, on a sorti des petits films au début parce que je voulais les voir. Mais je me suis cassé la gueule. On a perdu beaucoup d’argent sur ces petits films. On essaye d’en sortir moins. Mais parfois, il y a des petits films qui ont de l’intérêt avec un petit prix d’acquisition. Et dans ces cas-là, on se dit qu’on ne risque rien de donner sa chance au film et une chance aux gens de le découvrir. Finalement, je suis davantage tourné vers les gens que vers les films. Pour les producteurs, la France n’est qu’accessoire. S’il ne sort pas ici, ce n’est pas dramatique pour eux. Par contre, si je vois que des films en punjabi, en malayalam ou en télougou qui ne seront pas forcément sollicités par mes concurrents, peuvent rassembler un nombre décent de spectateurs ; alors je mets entre parenthèses l’intérêt commercial et je le sors.

Comment es-tu parvenu à entrer en contact avec les distributeurs et producteurs indiens ?

AP : Les producteurs ne font pas confiance, sauf quand il s’agit d’argent. La confiance vient de là. Du fait que le virement bancaire se fasse en bonne et due forme.

Mais ils ne te demandent pas de retour par rapport aux entrées de leurs films ?

AP : Oui, bien sûr ! Il y a plusieurs types de contrat. On doit parfois faire des comptes-rendus. Parfois, on paye un certain montant et ils ne s’intéressent pas à la suite qui est donnée. D’autres sociétés ont besoin d’un retour. Quasiment tous les films du nord sont dans ce dernier modèle. Tous les films du sud étaient dans le modèle inverse jusqu’à récemment. Le but, c’est de voir si j’ai généré plus de bénéfices que prévu afin de savoir s’ils peuvent m’en réclamer une part.

Mais concrètement, quel est le processus ?

AP : Grosso modo, c’est la négociation, l’acquisition. Et parallèlement, il y a deux choses qui se font à partir de ce stade : le marketing et la programmation. Ensuite, le compte-rendu, la comptabilité, la facturation…

J’ai une autre question. Est-ce que des producteurs viennent vers Aanna Films pour distribuer leurs métrages ?

AP : Oui. C’est souvent des petits films d’auteur qui ne trouvent pas de distributeur. Il arrive rarement qu’il s’agisse de films très intéressants même si ça nous arrive aussi que le projet soit formidable et qu’on lui donne de fait sa chance. Mais effectivement, on peut venir vers nous.

Justement. Quand Befikre (réalisation d’Aditya Chopra avec Ranveer Singh, ndlr) a été tourné en France avec toute la promotion qui s’en est suivie, as-tu eu le sentiment que ça ait changé la donne chez les distributeurs et producteurs indiens ?

AP : Ça aurait pu changer la donne. Mais le gros problème, c’est que Yash Raj Films (productrice de l’œuvre, ndlr) est une très grosse société au sein de laquelle tout est divisé en départements. Le département production est totalement séparé du département marketing. On aurait pu faire beaucoup de choses avec l’équipe de tournage qui aurait pu amener à un plus grand succès du film. Mais cela n’a pas pu se faire.

Une meilleure communication,
peut-être ?


AP : Oui, une meilleure communication. Une meilleure mise en lien avec la presse. Faire venir les exploitants des salles de cinéma sur le tournage pour qu’ils puissent se rendre compte de ce qui se fait. Une meilleure implication des différents acteurs locaux. Parce qu’un film comme Befikre, ça n’arrive pas tous les ans. C’est très exceptionnel. On aurait pu en profiter pour montrer aux professionnels d’ici et à la presse française l’impact de ce projet pour lui donner davantage de chance lors de sa sortie en salles.

Quand Aanna Films a été initié en 2009, les projections se centraient majoritairement sur la région parisienne. Depuis quelques années, de plus en plus de projections se font en province.
Etait-ce ta volonté ? Qu’est-ce que tu as mis en œuvre pour que ces projections se fassent ?


AP : Notre toute première sortie, Delhi Belly, c’était exclusivement au Gaumont Saint Denis. Le deuxième film était également au Gaumont Saint Denis seulement. Ça a été un tel carton que j’ai commencé à avoir quelques demandes de province. Car ce qui se faisait à l’époque du marché noir, ou du marché gris comme on l’appelait, c’est qu’une personne achetait un film pour la France et organisait les projections à La Courneuve. Mais quand d’autres villes voulaient diffuser le film en question, il faisait louer la bobine pour une somme fixe. On m’a formulé des demandes similaires. Mais je ne soutiens pas ce fonctionnement qui n’est pas du tout professionnel. Je les ai refusés à de multiples reprises. Mais lors de la sortie de Nanban

interview Agilane Pajaniradja Aanna Films (remake tamoul de 3 Idiots avec Vijay, ndlr), on a diffusé ce film dans plusieurs cinémas. Donc dans la liste de choses qu’on a fait en premier, il y a aussi ça ! C’était un truc de ouf, comme on dit ! Ça a marché. On a fait un nombre d’entrées record, la queue pour le film sortait carrément du cinéma, c’était énorme. Pour le film suivant, on a étendu à d’autres villes comme Toulouse, Marseille, etc. Ça a cartonné. Il y avait une demande initiale de la part des associations qui voulaient louer les bobines pour faire les choses à leur sauce, c’est quelque chose que je ne pouvais pas cautionner puisque ça n’était pas propice au développement. Parce que je voulais vraiment que les films indiens soient diffusés comme n’importe quel autre film. Je voulais qu’ils soient considérés comme n’importe quel autre film, et pas comme des œuvres communautaires. Et petit à petit, ça a pris de l’ampleur pour qu’on arrive à 55 villes françaises concernées.

Ça se développe considérablement, effectivement.

AP : Pour Padmaavat (réalisation de Sanjay Leela Bhansali, avec Deepika Padukone, ndlr), on en est à plus de 50 salles. Mais ça ne s’est pas fait en un jour. On était à une trentaine de salles la première semaine, et ça a presque doublé.

A Toulouse par exemple, la seule salle qui était concernée était pleine et pour répondre à la demande, elle a été doublée. Ma prochaine question rejoint un peu ce propos. Je sais que le Collectif Bollyciné soutient les sorties en province. Comment cette collaboration est-elle née ?

AP : Sarah (Beauvery, présidente du Collectif Bollyciné, ndlr), je la connaissais bien avant la naissance de Bollyciné. C’est elle qui m’a contacté au tout début. Je sais plus, je crois que c’était pour un film tamoul. A l’époque, elle était intéressée par Shahrukh Khan. Et puis, elle l’a largué pour Salman Khan (rires) ! Elle m’a à l’époque contacté pour faire les sous-titrages des films. Mais on ne travaillait pas encore ensemble. Puis on est restés en contact sur d’autres choses, toujours de façon annexe sans qu’on puisse réellement collaborer elle et moi. A un moment donné, elle m’a demandé pourquoi je n’organisais pas de projection à Nantes. C’est comme ça que tout a commencé. Le truc, c’est que je n’avais aucun contact sur Nantes, aucune association… rien. Et elle s’est proposée de trouver des gens qui porteraient ce projet sur place. C’était à l’époque de Ek Tha Tiger (avec Salman Khan, ndlr), donc évidemment… (rires). Elle n’a pas pu s’en empêcher ! Je ne perdais rien à tenter le coup. Et en plus, c’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup. Donc le film a été projeté à Nantes, et ça a été un succès. En rentrant chez elle après la séance, elle a donc créé Bollyciné.

C’est un partenaire qui perdure, de surcroît.

AP :C’est un partenariat assez fort car c’est une relation qui est née bien avant tout ça, même si ça tournait autour des films. Et on s’entend très bien, je sais que je peux lui faire confiance, et inversement. Parce qu’il ne s’agit pas juste de promouvoir des films. C’est un peu plus complexe que ça. En ce sens, j’ai besoin de travailler avec des gens fiables.

Donc ça va faire 10 ans en 2019 que tu as créé ta société. Ça marche très bien... Est-ce que tu as de nouvelles ambitions ou bien tu te satisfais de la manière dont tournent les choses ?

AP : Alors, il faut que je te parle de l’actualité d’Aanna Films. J’ai lancé une augmentation de capital en décembre 2017…

Ça veut dire quoi ? Parce que j’y connais rien, moi !

AP : C’est très simple. Une société comme Aanna Films, on l’a créée avec 7000 euros. Les films peuvent coûter très cher. Le film le plus cher dont on a fait l’acquisition nous a coûté 110 000 euros. Et donc, faire tourner une entreprise comme Aanna Films avec des produits qui peuvent coûter jusqu’à 110 000 euros, c’est extrêmement difficile. Surtout quand on a démarré avec 7000 euros ! Encore plus lorsque le film se vautre. Donc, à quoi va servir l’augmentation de capital ? Avec tout ce que vous voyez aujourd’hui de notre activité, on l’a fait avec très peu d’argent. Maintenant, on a envie d’aller plus loin, on a envie de faire plus de choses. Et pour ça, on a besoin de moyens. Si on a pu faire tout ça avec 7000 euros, imaginez ce qu’on peut faire si on avait plus d’argent. C’est un peu ça l’objectif. Et cet argent, il faut qu’on le trouve. Ainsi, on propose de revendre une partie de la société à quiconque souhaite y investir. C’est aussi simple que ça. C’est quelque chose de très réglementé par l’État. Pour quelqu’un qui souhaite participer à l’aventure, le billet d’entrée s’élève à 550 euros. Ça peut aller jusqu’à 300 000 euros. L’augmentation de capital est réglementée par l’Etat dans le but de protéger les investisseurs. Concrètement, le but de l’augmentation de capital c’est, bien sûr, d’avoir plus de moyens pour aller plus loin dans nos ambitions.

Pour conclure, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite de l’aventure Aanna Films ?

AP : Très sincèrement, je suis très concentré sur l’augmentation de capital parce que j’estime que la viabilité de la société et de ses ambitions en dépend. On a atteint le maximum de nos possibilités avec nos petits moyens. Et aujourd’hui, c’est ma priorité.

interview Agilane Pajaniradja Aanna Films Une autre question qui n’était pas prévue mais que je me pose. Est-ce que ton expérience de de distributeur a altéré sa sensibilité de cinéphile ?

AP : Pour quelqu’un qui aime le cinéma et qui aime regarder des films, il faut éviter de savoir ce qu’il se passe derrière, dans toute la partie industrielle. Parce que c’est quelque chose de très moche. Par exemple, il y a des films que j’avais envie de voir mais la négociation et l’acquisition se sont si mal passées que ça m’a dégoûté de l’œuvre elle-même. Je suis certes devenu distributeur pour voir plus de films, mais dans les faits, j’en vois moins. Parce qu’il y a beaucoup de travail. Parce que ce ne sont plus des films mais des produits. J’ai de facto un regard totalement différent.

Aujourd’hui, en venant au Festival des Cinémas Indiens de Toulouse, quelle était ta posture ? Distributeur ou cinéphile ?

AP : En tant que distributeur, je ne serais pas venu. C’est une très bonne question d’ailleurs, c’est important de se le dire. Le Festival des Cinémas Indiens de Toulouse est spécial pour moi parce que j’ai retrouvé cette envie d’aller voir des films. Quand j’ai vu la programmation, j’ai eu cette envie. Je ne suis allé à aucun festival jusqu’à aujourd’hui avec la seule envie de voir les films qui y sont projetés. J’y vais souvent pour des rendez-vous professionnels ou pour représenter Aanna Films. L’année dernière, j’étais juste venu pour voir Naan Kadavul (réalisation tamoule de Bala avec Arya, ndlr) parce que c’est un film que j’adore. Cette année, je n’avais pas l’intention de revenir. Mais quand j’ai vu la programmation, j’ai été motivé par les métrages prévus. Il y a au moins 4 films de cette édition que j’avais vraiment envie de découvrir. Du coup, il fallait que je vienne !

Mais ça te fait peut-être du bien de venir en tant que simple spectateur, non ?

AP : Ça me fait un bien fou ! Parce que je peux voir des films dans le cadre d’un festival car c’est un événement qui regroupent tous ces films.

Je te cache pas que lorsqu’on t’a rencontré la première fois lors de la projection de Vikram Vedha, t’étais sapé comme jamais (rires), vêtu d’un costume. Ce jour-là, j’étais prête à te faire une révérence ! (rires) Mais je t’avouerais que je suis ravie de te revoir dans ce contexte-ci puisqu’on se rend compte qu’il y a beaucoup de simplicité et de cœur dans le travail que tu fais. C’est dommage parce que j’ai pas eu l’occasion d’y avoir accès avant.

AP : J’ai aucune formation en entreprenariat. J’ai lancé Aanna Films par passion. J’ai appris à me durcir. Pour tout vous dire, les filles, je déteste être en costume. En fait, je déteste être bien habillé. Toute mon enfance, j’ai été habillé en haillons (rires). J’adorais ça en plus ! Avec le travail, avec le fait de devoir se présenter d’une certaine façon, j’ai été obligé d’adopter une posture particulière. Mais le soir de la projection de Vikram Vedha, c’était spécial. Rencontrer Vijay Sethupathi… Je m’en suis toujours pas remis.

Mais nous non plus ! (rires)

Et puis, on a continué à se remémorer ce fameux soir d’octobre 2017, où l’unique Makkal Selvan est venu à la rencontre de ses fans à Paris. Où je me suis improvisée en garde du corps pour lui. Où ce moment, aussi dingue qu’il ait pu être, est resté ancré en nous comme l’un des plus démentiels de nos existences respectives. Encore merci à Agilane de sa gentillesse. Encore merci à Frédérique Bianchi, qui nous a conviées à cet événement et qui a donc contribué à ce que cette rencontre se fasse. Agilane, merci pour ce moment. On attend de te retrouver avec grand plaisir autour du verre que tu nous as promis !

On vous rappelle d’ailleurs que Race 3 est sorti dans les salles françaises depuis le 15 juin dernier, juste le jour de la fête de l’Aïd. Un beau cadeau pour les fans. Distribué par Aanna Films.

Site : aannafilms.fr
Facebook : @aannafilms

Pour plus d’informations concernant l’investissement, contacter Agilane sur le site d’Aanna Films.

— PHOTOGRAPHIE DE PIERRE RIEU LORS DU FESTIVAL DES CINÉMAS INDIENS DE TOULOUSE.

mots par
Asmae Benmansour
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"Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même."