La triple critique de : Mukkabaaz (★★★★★)
15 février 2019
— Cet article a été publié dans le numéro 14 de Bolly&Co, page 100.
Dans notre 14ème edition de Bolly&Co, Mukkabaaz s'est retrouvé dans notre rubrique, la triple critique. Cette réalisation d'Anurag Kashyap sera projeté lors de la cérémonie de clôture duFestival du Film d'Asie du Sud dimanche 17 février !
Je ne voulais pas spécialement voir Mukkabaaz. Du moins, pas dans l’immédiat. Je sais, c’est étrange quand on sait qu’Anurag Kashyap est mon réalisateur indien favori. Mais en voyant la bande-annonce, je pensais savoir à quoi j’aurais affaire. Un film de sport ? Encore ? Un film sur la boxe, qui plus est ? J’avais déjà donné avec Mary Kom et Irudhi Suttru. J’étais donc résolue à laisser ce métrage de côté quelques temps pour privilégier des œuvres qui me tentaient beaucoup plus.
Et puis, Elodie m’a saoulée. Elodie, aussi adorable puisse-t-elle être, a ce don de vous rabâcher le nom d’un film si elle estime que vous vous devez de le voir. Et je dois avouer qu’à chaque fois, elle a raison. Elle me connaît bien et sait quel genre de métrages sera susceptible de m’émouvoir. Pourtant, je repousse l’échéance. J’ai une liste de films aussi longue que le bras à visionner, et Mukkabaaz n’est pas en tête ! Elodie dégaine donc l’artillerie lourde mais en arborant la mignonnerie qui la caractérise : « Et si on parlait de Mukkabaaz dans le prochain numéro ? Et dans le cadre de la triple critique ? » Je suis coincée. Mukkabaaz fera donc partie de mes prochains visionnages, que je le veuille ou non.
Et agacée. Oui, parce que dans ma tête, il y a la voix d’Elodie qui raisonne et qui n’a de cesse de répéter frénétiquement « Je te l’avais dit ! Je te l’avais dit ! Je te l’avais dit ! ». Effectivement. Ma première surprise, et pas des moindres, c’est le genre du film. Car contrairement à ce que je pensais, Mukkabaaz ne relève pas du film de sport.
Amen ! Certes, la boxe y est très présente. Mais ce n’est pas le sujet de fond du métrage, qui constitue un véritable récit de vie sur ce jeune homme qui, au-delà de rêver de gloire et de médailles, rêve d’épouser son grand amour. Oui, Mukkabaaz est une œuvre romantique… à la sauce Kashyap ! Il y a des coups de sang, de la corruption, de l’injustice sociale… Car Anurag Kashyap n’est pas un réalisateur qui se laisse aller à la facilité. Entre l’histoire d’amour et l’enjeu sportif, le cinéaste truffe son histoire de véritables questionnements quant au fonctionnement des fédérations sportives mais aussi sur la situation des couples inter-castes. Pour autant, rien n’est intellectualisé. Kashyap n’est pas là pas pour faire un film social. Ce qui prime, ce sont les émotions des protagonistes.
J’avais un vague souvenir de Vineet Kumar Singh dans Gangs of Wasseypur, sans qu’il m’ait plus marqué que ça. Il faut dire qu’il s’était clairement fait voler la vedette par le formidable Nawazuddin Siddiqui, dont le rôle était, au demeurant, bien plus important. Avec Mukkabaaz, il hérite enfin du personnage principal qui peut le révéler. Pari gagné puisque l’acteur est tout bonnement saisissant dans la peau de Shravan, archétype du bon à rien qui s’accroche à son rêve. Vineet donne à Shravan son dynamisme et son charisme. Jimmy Shergill, que j’adore, est détestable dans le rôle de Bhagwan, cet homme intéressé et impitoyable. Il prouve ainsi qu’il est à la fois capable de nous toucher par sa tendresse (cf Mohabbatein, Dil Hai Tumharaa) tout en nous bousculant dans des rôles plus rudes. Mais la révélation du film s’appelle Zoya Hussain, qui prête son image au personnage de Sunaina, jeune fille muette dont s’éprend éperdument Shravan.La jeune femme a appris le langage des signes pour ce rôle qu’elle fait vivre avec un incroyable panache. Si Sunaina est muette, elle est loin d’être passive. Effrontée et vaillante, elle cueille par sa rage de vaincre et sa ténacité. Coup de cœur. C’est clairement l’un des films plus intéressants de cette première moitié de l’an 2018. Il constitue pour ma part une très belle surprise et une confirmation... Lire la suite ?
Dans notre 14ème edition de Bolly&Co, Mukkabaaz s'est retrouvé dans notre rubrique, la triple critique. Cette réalisation d'Anurag Kashyap sera projeté lors de la cérémonie de clôture du
Un faux film de sport.
Je ne voulais pas spécialement voir Mukkabaaz. Du moins, pas dans l’immédiat. Je sais, c’est étrange quand on sait qu’Anurag Kashyap est mon réalisateur indien favori. Mais en voyant la bande-annonce, je pensais savoir à quoi j’aurais affaire. Un film de sport ? Encore ? Un film sur la boxe, qui plus est ? J’avais déjà donné avec Mary Kom et Irudhi Suttru. J’étais donc résolue à laisser ce métrage de côté quelques temps pour privilégier des œuvres qui me tentaient beaucoup plus.
Et puis, Elodie m’a saoulée. Elodie, aussi adorable puisse-t-elle être, a ce don de vous rabâcher le nom d’un film si elle estime que vous vous devez de le voir. Et je dois avouer qu’à chaque fois, elle a raison. Elle me connaît bien et sait quel genre de métrages sera susceptible de m’émouvoir. Pourtant, je repousse l’échéance. J’ai une liste de films aussi longue que le bras à visionner, et Mukkabaaz n’est pas en tête ! Elodie dégaine donc l’artillerie lourde mais en arborant la mignonnerie qui la caractérise : « Et si on parlait de Mukkabaaz dans le prochain numéro ? Et dans le cadre de la triple critique ? » Je suis coincée. Mukkabaaz fera donc partie de mes prochains visionnages, que je le veuille ou non.
Sauf qu’à la fin du métrage, j’étais enchantée.
Et agacée. Oui, parce que dans ma tête, il y a la voix d’Elodie qui raisonne et qui n’a de cesse de répéter frénétiquement « Je te l’avais dit ! Je te l’avais dit ! Je te l’avais dit ! ». Effectivement. Ma première surprise, et pas des moindres, c’est le genre du film. Car contrairement à ce que je pensais, Mukkabaaz ne relève pas du film de sport.
Amen ! Certes, la boxe y est très présente. Mais ce n’est pas le sujet de fond du métrage, qui constitue un véritable récit de vie sur ce jeune homme qui, au-delà de rêver de gloire et de médailles, rêve d’épouser son grand amour. Oui, Mukkabaaz est une œuvre romantique… à la sauce Kashyap ! Il y a des coups de sang, de la corruption, de l’injustice sociale… Car Anurag Kashyap n’est pas un réalisateur qui se laisse aller à la facilité. Entre l’histoire d’amour et l’enjeu sportif, le cinéaste truffe son histoire de véritables questionnements quant au fonctionnement des fédérations sportives mais aussi sur la situation des couples inter-castes. Pour autant, rien n’est intellectualisé. Kashyap n’est pas là pas pour faire un film social. Ce qui prime, ce sont les émotions des protagonistes.
Un casting remarquable.
J’avais un vague souvenir de Vineet Kumar Singh dans Gangs of Wasseypur, sans qu’il m’ait plus marqué que ça. Il faut dire qu’il s’était clairement fait voler la vedette par le formidable Nawazuddin Siddiqui, dont le rôle était, au demeurant, bien plus important. Avec Mukkabaaz, il hérite enfin du personnage principal qui peut le révéler. Pari gagné puisque l’acteur est tout bonnement saisissant dans la peau de Shravan, archétype du bon à rien qui s’accroche à son rêve. Vineet donne à Shravan son dynamisme et son charisme. Jimmy Shergill, que j’adore, est détestable dans le rôle de Bhagwan, cet homme intéressé et impitoyable. Il prouve ainsi qu’il est à la fois capable de nous toucher par sa tendresse (cf Mohabbatein, Dil Hai Tumharaa) tout en nous bousculant dans des rôles plus rudes. Mais la révélation du film s’appelle Zoya Hussain, qui prête son image au personnage de Sunaina, jeune fille muette dont s’éprend éperdument Shravan.La jeune femme a appris le langage des signes pour ce rôle qu’elle fait vivre avec un incroyable panache. Si Sunaina est muette, elle est loin d’être passive. Effrontée et vaillante, elle cueille par sa rage de vaincre et sa ténacité. Coup de cœur. C’est clairement l’un des films plus intéressants de cette première moitié de l’an 2018. Il constitue pour ma part une très belle surprise et une confirmation... Lire la suite ?