Bolly&co Magazine

Kangana Ranaut, la déchéance.

6 janvier 2025
Kangana Ranaut
Lorsqu'elle débute sa carrière en 2006 avec le drame Gangster – A Love Story, la jeune Kangana Ranaut est présentée comme l'une des comédiennes les plus prometteuses de sa génération. Et elle ne fera pas mentir cette prédiction puisque seulement deux ans plus tard, elle rafle le National Award du Meilleur Second Rôle Féminin pour sa prestation d'écorchée vive dans Fashion. Ainsi, la comédienne s'impose comme la nouvelle incarnation de l'héroïne dramatique à Bollywood. Ce qui ne l’empêchera pas de faire un virage risqué vers la comédie dès 2011 avec Tanu Weds Manu, qui sera pour elle particulièrement salutaire. En effet, 3 ans plus tard, elle est exceptionnelle dans Queen, pour lequel elle remporte le National Award de la Meilleure Actrice.

Vous l'aurez compris, en quelques années de carrière, Kangana Ranaut a clairement fait comprendre à l'industrie hindi qu'il faudra composer avec elle !

Toutefois, cela n'a pas vraiment duré. Malgré un avenir empli de promesses et un incontestable potentiel, le parcours de Kangana s'est enlisé dans les abysses de la médiocrité ! Vous me trouvez dure ? Alors, laissez-moi vous expliquer à quel moment Kangana a merdé…

Le point d’orgue : Manikarnika - The Queen of Jhansi.

Comme son titre l'indique, le métrage porte sur la grande histoire de la reine de Jhansi, incarnée ici par Kangana. Le film est réalisé par Krish, auquel on doit notamment les films télougous acclamés Vedam (2010) et Kanche (2016). Un changement de casting de dernière minute rallongeant la durée du tournage, Krish doit quitter ses fonctions de metteur en scène pour assurer d'autres engagements. Qu'à cela ne tienne, Kangana se saisit du poste et réalisera une hagiographie vulgaire et à la réécriture historique dangereuse. Pourtant, à la surprise générale, elle remportera le National Award de la Meilleure Actrice pour ce rôle d'une pertinence très douteuse. Une façon d’entériner sa connivence avec le parti au pouvoir, aux valeurs d'extrême droite assumées…



Qualité ne rime pas avec succès : Rangoon, Simran, Panga et Judgementall Hai Kya.

Kangana a beau s'accoquiner avec le BJP, elle reste une actrice exigeante avant tout. C'est ainsi qu'entre 2017 et 2020, elle prend part à 4 films intéressants. Le premier, Rangoon (2017), l'illustre en version fictive de la star des années 1930 Fearless Nadia. Le second, Simran (2017), constitue une comédie dramatique douce-amère plutôt fine et atypique. Le troisième, Panga (2020), lui permet d'explorer avec un certain brio le registre du film de sport. Enfin, le quatrième, Judgementall Hai Kya (2019), est sûrement sa proposition la plus survoltée, la plus sous-valorisée également. Hélas, malgré les retours enthousiastes de la presse, aucun de ces films ne trouvera son public. C'est donc officiel : Kangana n'est plus une artiste bankable…



N’est par Sridevi qui veut : Thalaivii.

Souhaitant sûrement surfer grossièrement sur le succès immense du métrage télougou Mahanati (2019), Kangana se frotte à l'exercice du biopic en incarnant l'actrice et politicienne Jayalalithaa dans ce film pan-indien. Entendez par là qu'il s'adresse au public national et qu'il bénéficiera à ce titre d'une sortie en hindi et en tamoul. Face au plébiscite grandissant des films dravidiens, on sent ainsi chez Kangana cette volonté d'élargir son activité aux autres industries indiennes. Malheureusement, Thalaivii fera un véritable bide au box-office. Et si les critiques sont toujours aussi tendres avec elle, le métrage est surtout l'occasion pour Kangana de marquer une césure avec Bollywood. En effet, alors que l’œuvre lui vaudra une nomination pour le Filmfare Award de la Meilleure Actrice, la vedette annonce sur ses réseaux sociaux refuser cette distinction puisque, selon elle, la cérémonie est une mascarade qui promeut l’entre-soi et le népotisme de l'industrie. Elle déclare même que les organisateurs monnayent la présence des acteurs en échange d'un trophée… Face à de telles accusations, l'équipe des Filmfare Awards révoquera la nomination de la comédienne…



Bad girl or bad movie ? Dhaakad

Dans ce film d'action sur fond d'espionnage, Kangana Ranaut tente d'illustrer sa physicalité dans un rôle de 'army woman' terriblement cliché ! L'intention est louable, d'autant que de tels personnages féminins sont rares à Bollywood... Mais l'exécution n'y est pas, tant dans la réalisation que dans l'écriture foireuse du métrage. Résultat : Dhaakad deviendra l'un des plus gros flops commerciaux de l'histoire du cinéma hindi, et amènera la comédienne à changer (encore !) son fusil d'épaule…



Les conséquences de la fainéantise : Chandramukhi 2.

Clairement, l'actrice ne s'est pas foulée avec cette suite spirituelle en langue tamoule, dans laquelle elle a en plus le mauvais goût de ne faire aucun effort ! Il y a ici la volonté claire de capitaliser sur un film culte, en l'occurrence Chandramukhi (2005), avec nul autre que la superstar Rajinikanth. Malheureusement, tout est moins bien dans ce second volet, qui ne propose rien de plus. Face au succès du premier film et des remakes qu'il a engendrés (notamment Bhool Bhulaiyaa, sorti en 2007), Kangana s'est sûrement dite que participer à un tel univers serait une garantie de succès. Il n'en sera rien puisqu'avec ce métrage de Kollywood, la star signe un nouveau four monumental au box-office…



Tom Cruise ? Non, plutôt Tom Croute : Tejas.

Kangana a manifestement bien lu son Top Gun illustré puisqu'elle applique ici la même formule ! Au menu : iconisation malsaine du héros “au féminin”, scènes de bravoure intense sur fond de musique mélodramatique, plans particulièrement flatteurs sur notre protagoniste… Par contre, la jeune femme ajoute un élément absent des films de Tom Cruise : la propagande. Le film, de par son message très à droite, a été largement promu par des hommes politiques du BJP. Elle accuse même les personnes qui osent critiquer son œuvre d'être anti-patriotes… Bref, la comédienne mélange tout, se laisse aller aux amalgames et n'a plus aucune limite pour promouvoir son film. Elle ira jusqu'à se rendre à l'ambassade d'Israël pour y parler de son œuvre, à l'ère d'un génocide destructeur sur la bande de Gaza… Une honte.



La propagande à son paroxysme : Emergency.

Au-delà de ses coups de pub multiples (de sa liaison présumée avec Hrithik Roshan à ses attaques multiples envers Karan Johar, en passant par son instrumentalisation de la mort de Sushant Singh Rajput…), on arrive clairement au point de rupture de la comédienne. A ce qui a précipité sa chute, aussi bien auprès du grand public que de la critique. Avec Emergency, Kangana incarne Indira Gandhi, ancienne cheffe du gouvernement indien dans un film aux couleurs politiques limpides. Son lien avec le BJP (duquel elle est désormais élue depuis 2024) ne laisse effectivement aucun doute, de même pour l’opposition historique de cette mouvance avec le Parti du Congrès. Et comme si ce n'était pas déjà assez grave, Kangana rempile à la réalisation, et on a déjà vu ce que ça donnait avec Manikarnika



mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?