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La critique de : The Mumbai Murders (★★★★☆) #FFAST2016

24 octobre 2016
critique film ffast festival paris The Mumbai Murders The Mumbai Murders fait partie des œuvres en compétition pour le Festival du Film d'Asie du Sud, auquel nous assistons depuis mardi dernier. Il s'agit de la dernière réalisation en date de l'excellent Anurag Kashyap.

Alors, qu'en avons-nous pensé ?



Ramanna (Nawazuddin Siddiqui) est un tueur qui sévit en s'inspirant de son modèle, le célèbre serial killer Raman Raghav. Les meurtres qu'il commet font l'objet d'une enquête menée par l'inspecteur Raghavan Singh (Vicky Kaushal). Une chasse à l'homme commence pour muer en quête de l'âme sœur...

En effet, The Mumbai Murders est une œuvre profondément romantique. Pourtant, point de donzelle de laquelle s'amouracher ni de séquences musicales dans les montagnes suisses ! Mais le film narre surtout l'histoire d'un homme à la recherche de la personne qui saura le compléter et le comprendre dans son état d'esprit détraqué.

Il faut souligner la complémentarité des deux héros. Si Raman affiche une implacable quiétude, Raghav est un homme instable, bousillé par chacun de ses actes. Nawazuddin Siddiqui est terrifiant en tueur sociopathe, qui massacre de sang froid ceux qui l'entourent. Il prouve à quel point il excelle lorsqu'un cinéaste a l'intelligence de lui proposer un rôle principal d'envergure. Vicky Kaushal, qui faisait des débuts attendrissants dans l'acclamé Masaan, fait ici un virage à 180°. En flic névrosé qui mue en véritable psychopathe, le comédien est bluffant d'intensité.

La reine de beauté Sobhita Dhulipala lance sa carrière au cinéma avec ce métrage et affiche une aisance impressionnante. Elle tient formidablement tête à Vicky dans leurs scènes communes et sa prestation reste en mémoire tant la jeune femme marque par sa présence et son charisme. Anurag Kashyap a effectivement ce talent pour identifier les acteurs qui seront les plus à même de porter ses personnages estropiés et écorchés vifs, et ce indépendamment de leur image commerciale.

Le montage d'Aarti Bajaj, (accessoirement ex-femme d'Anurag) avec laquelle il a travaillé sur nombre de ses projets, est sectionné en chapitres de manière tout à fait pertinente, et permet de restituer l'évolution des protagonistes et surtout d'illustrer leur déchéance. La bande-originale composée par Ram Sampath est moderne et sulfureuse, s'imprégnant ainsi impeccablement de l'atmosphère de l'œuvre.

Une scène m'a particulièrement plu, durant laquelle le héros explique que ses crime ne recouvrent aucune vocation : il tue pour tuer. Il ne veut pas commettre de meurtres sous couvert d'un uniforme, d'une religion ou d'un prétexte lié à l'honneur. Le réalisateur soulève ainsi la question du sens qui est mis à l'acte de tuer, là où un meurtre reste un meurtre, qu'il soit exécuté par un policier, par un terroriste ou par un homme qui veut « préserver le statut » de sa famille.

Au cœur d'une ère où certaines forces de l'ordre restent impunies après avoir tué des personnes innocentes, où le terrorisme fait rage (consolidant l'amalgame avec la religion que ces gens disent représenter) et où les crimes d'honneur sont encore prégnants en Inde ; Anurag Kashyap revient sur l'essence même d'une assassinat et ne dépeint pas un anti-héros qui aurait une pseudo-cause à défendre ou une raison concrète qui puisse expliquer ses gestes. Tuer n'est acceptable sous aucun prétexte, encore moins au nom de la foi ou de l'honneur.

En conclusion, The Mumbai Murders est un film coup de poing qui s'appuie sur le talent de ses acteurs vedettes ainsi que sur sa mise en scène abrupte et frontale. L'œuvre de Kashyap a le souci de faire réfléchir ses spectateurs tout en les divertissant. L'écriture est telle que le protagoniste, qui nous dérange profondément par sa froideur au début du métrage, nous devient presque sympathique par la sincérité de son intention et par sa transparence. The Mumbai Murders nous a ainsi clairement troublé. Voilà un coup de cœur de l'équipe qui vous invite à découvrir ce film à la fois flippant et transcendant !
LA NOTE: 4/5
★★★★☆
mots par
Asmae Benmansour
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"Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même."