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La critique de : Under Construction (★★★☆☆) #FFAST2016

25 octobre 2016
critique film ffast festival paris Under Construction Under Construction est un film qui fait du bien. Deuxième réalisation de la cinéaste bangladaise Rubaiyat Hossain après Meherjaan, le métrage met en image le féminisme sous différentes formes, et ce que l'on soit mère de famille, actrice libérée ou femme de ménage...

Roya (Shahana Goswami) est l'héroïne de la pièce de théâtre Red Oleanders du célèbre Rabindranath Tagore. Mais elle vieillit, et le metteur en scène décide de la remplacer par une débutante. Qu'à cela ne tienne, elle ne se retrouvait plus dans ce rôle de femme idéalisée et irréprochable, qui incarne l'épouse traditionnelle de manière symbolique. Encouragée par l'artiste indépendant Imtiaz Ilahi (Rahul Bose) et inspirée par son employée et confidente Moyna (Ritika Nandini Shimu), elle décide de monter sa propre version de la pièce, ancrée dans la réalité de son pays...

Under Construction nous saisit par la puissance de ses personnages féminins. Celle qui capte notre attention est sans aucun doute la lumineuse Shahana Goswami, bouleversante et tellement authentique dans ce rôle principal qui met merveilleusement son talent en valeur. La comédienne incarne une Roya forte, qui ose mener à bien ses projets et s'accomplir bien au-delà de son statut d'épouse. Lorsqu'on la targue sur son âge (elle a 33 ans dans le film) dans le milieu du théâtre, elle créé sa pièce par elle-même et y amène au passage de son identité. Quand on l'invite à envisager la maternité au prétexte que son horloge biologique tourne, la jeune femme s'y refuse. Rubaiyat lui a écrit un bien joli rôle, évitant les situations convenues et explorant les potentialités, questionnements et frustrations de Roya avec magnitude et justesse. De sa vie sexuelle insipide à sa relation compliquée avec sa mère, on s'identifie à elle sans difficulté grâce à la prestation sensible de Shahana.

C'est une actrice pour laquelle j'avais eu un coup de foudre littéral en 2008, après le visionnage de l'excellent Rock On !! Depuis, j'ai pu visionner plusieurs de ses œuvres intéressantes, de Firaaq à Mirch, en passant par Ru Ba Ru et Les Enfants de Minuit. Elle fait partie de ces visages du cinéma indien sur lesquels il faut s'attarder.

Rahul Bose s'illustre dans un rôle plus convenu de héros libérateur, qui impulse indirectement la soif de liberté et d'épanouissement de Roya. L'acteur coutumier des œuvres indépendantes prouve ainsi qu'il n'a pas peur de s'effacer pour servir une œuvre au message puissant.

Mita Rahman incarne la mère de Roya, abandonnée par son mari et qui n'accepte pas les choix de sa fille. Cette femme est cependant une véritable force de la nature. Derrière son discours téléphoné sur la place de la femme, elle mène son quotidien par elle-même et ne dépend nullement d'une quelconque autorité masculine. Ritika Nandini Shimu campe de son côté Moyna, l'employée de Roya que cette dernière surinvestit. Leur relation est saine, Roya agissant comme une grande sœur auprès d'elle. Elle souhaite que Moyna fasse des études et s'accomplisse seule. En jeune fille de milieu populaire qui lutte pour assurer l'avenir de son enfant, l'actrice est formidable et semble la plus optimiste des trois héroïnes.

La bangladaise Rubaiyat Hossain a mûri en tant que cinéaste, passant d'une œuvre plus conventionnelle comme Meherjaan à un film intimiste et viscéralement lié à ses valeurs avec Under Construction. On y découvre trois lectures du féminisme à travers Roya, sa mère et Moyna, les hommes ne leur servant que de faire-valoir.

Under Construction est en conclusion une œuvre sincère et personnelle, qui s'appuie sur une mise en scène brute et sans fioriture. La musique n'est que très peu présente, la force de son histoire et la qualité de son casting se suffisant à eux-mêmes.
LA NOTE: 3/5
★★★☆☆
mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?