Bolly&co Magazine

La critique de : Saankal (★★★☆☆) #FCIT2017

26 avril 2017
critique film festival toulouse Saankal S’il y a bien un film dont j’attendais la projection, c’était Saankal. Pourquoi ? Parce que sa trame me semblait aussi improbable qu’intrigante. J’étais plus que curieuse de découvrir le contenu de ce métrage centré sur une coutume encore pratiquée dans des villages reculés d’Inde. C’est d’ailleurs la première réalisation de Dedipya Joshii et aucun membre du casting n’est vraiment connu du grand public…

Le Festival des Cinémas Indiens de Toulouse a exprimé avec force sa volonté de mettre en avant cette année plusieurs films qui sont à l’opposé de ces superproductions auxquelles nous sommes habitués à Bollywood. Saankal fait partie de ces métrages qui sont projetés pour la première fois en France. Je salue cette démarche qui permet à l’audience de vraiment découvrir des œuvres atypiques et inédites. Saankal, c’est ce mariage forcé d’une femme de 26 ans, Abeera, à un garçon de 11 ans, Kesar. Cette terrible coutume a été instaurée par les musulmans du Rajasthan peu après la partition des Indes en 1947. Si l’histoire est une fiction, son fondement est une réalité. Car cette coutume, elle, existe bel et bien. Mais Saankal va bien plus loin et le choc est total.

La force de l’œuvre réside dans cette perturbation que l’on ressent du début à la fin. Comment des choses pareilles peuvent-elles se faire ? Le scénario possède un je-ne-sais-quoi théâtral qui le rend léger et juste, mais qui, dans le fond est faible. La réalisation extrêmement simpliste est un peu dépassée, mais apporte à l’histoire un réalisme encore plus troublant. Parce que le film commence en nous racontant une histoire d’amour et cette histoire qui semble tout à fait normale, ne l’est pas forcément pour nous. C’est cette rencontre brutale entre notre monde et celui du film, celui d’une réalité en Inde qui nous dépasse, qui va créer quelque chose chez le spectateur.

Le but de Saankal était de dénoncer une monstrueuse pratique.

Pour cela, Dedipya Joshii a présenté la coutume de manière subtile en se focalisant surtout sur l’histoire entre Kesar et Abeera. En jouant la carte de la logique, là où nous savons que quelque chose cloche. Clairement, Abeera n’est pas la seule victime. Kesar l’est tout autant. L’intrigue nous oblige à réfléchir à ces traditions qui ne devraient pas exister, et y apporte même une réponse potentielle. Il faut briser la chaine qui nous lie à ces pratiques. Les acteurs sont tous impeccables. Mention spéciale à la sublime Tanima Bhattacharya qui a su interpréter le rôle d’Abeera de manière tout à fait impressionnante. Elle m’a rappelé ces actrices d’autrefois qui, en un regard, arrivaient à faire passer quantité d’émotions. Le jeune Chetan Sharma a également su faire preuve de maturité dans ces deux interprétations de Kesar, en adolescent et en jeune adulte. La musique est d’ailleurs très douce et accompagne l’histoire sans la perturber. Enfin, le Rajasthan fait partie intégrante de la trame et est illustré vivement à travers les décors et l’ambiance générale du métrage.

Saankal peut être difficile à regarder. Certains passages sont particulièrement déroutants. Le métrage nous bouscule et laisse une marque profonde qui vient faire oublier tous ses défauts. On comprend l’intention de l’œuvre, l’histoire qu’elle nous narre et les problèmes sociaux qui y sont mis en avant. Le visionnage est alors une vraie expérience. Imparfaite. Troublante. Inoubliable.
LA NOTE: 3/5
★★★☆☆
mots par
Elodie Hamidovic
contacter
"A grandi avec le cinéma indien, mais ses parents viennent des pays de l'est. Cherchez l'erreur."