Bolly&co Magazine

La critique de : Thar, les trois cibles (★★★★☆)

13 mai 2022
critique thar les trois cible Harshvardhan Kapoor Fatima Sana Shaikh
Thar, les trois cibles, est sorti sur Netflix le 6 mai dernier, avec des sous-titres français. Et ce en même temps qu'en Inde. Quand je pense qu'il y a 10 ans, nous devions lutter pour voir un film indien sous-titré en français correctement, sans même imaginer pouvoir le visionner à sa date de sortie... Aujourd'hui, grâce aux distributeurs qui œuvrent pour nous offrir nombre de ces films en salles et aussi grâce aux plateformes de streaming qui, il faut bien l'avouer, ont rendu ce cinéma bien plus accessible, c'est non seulement possible mais en plus, c'est récurrent !

Réalisé par Raj Singh Chaudhary qui a écrit les films No Smoking et Gulaal pour Anurag Kashyap et dont le premier essai en tant que metteur en scène, Shaadisthan, m'avait plutôt convaincue ; Thar voit s'affronter Harshvardhan Kapoor en meurtrier vengeur et Anil Kapoor en flic ambitieux. Si le père et le fils se sont déjà donnés brièvement la réplique dans le film méta AK VS AK, c'est la première fois qu'ils sont tous deux les héros d'un seul et même métrage.

Et si j'ai une admiration sans limite pour Anil, qui a réussi à me rendre supportables des films douloureux comme Mubarakan ou Welcome par sa seule présence, j'ai toujours eu un peu plus de mal avec Harshvardhan.

J'avais notamment trouvé sa prestation dans l'intéressant Bhavesh Joshi Superhero un peu molle, surtout face à Priyanshu Painyuli qui était à mon sens la révélation de cette œuvre nerveuse de Vikramaditya Motwane. Cela dit, je dois lui reconnaître une chose : son envie de participer à des films authentiques et risqués, sans céder à l'appel du blockbuster bourrin. Car effectivement, depuis ses débuts en 2016 dans la fresque Mirzya, Harshvardhan a su privilégier la qualité à la quantité, en participant à des projets exigeants et pas spécialement tournés vers le grand public. Et ça, c'est franchement respectable.

Le film est un hommage vibrant au genre du western.

Sa réalisation fait effectivement la part belle au désert de Thar, qui constitue clairement un personnage majeur de la narration, allant jusqu'à donner son nom à l'œuvre. Sur le papier, Thar aurait pu être une histoire de vengeance comme on en a déjà vu au cinéma indien (je ne citerais dans ce registre que Ghajini et Malang). Et là où un Badlapur (sorti en 2015 avec Varun Dhawan) est parvenu à transformer ce schéma narratif pour en faire quelque chose de plus profond et de plus complexe, qu'en est-il de Thar ?

Je ne vais pas vous mentir, il y a des enjeux narratifs que l'on sent venir à des kilomètres. Le réalisateur ne cherche d'ailleurs pas à instaurer le suspense autour de l'identité du tueur car au final, ce n'est pas l'objectif. On apprend très tôt dans le film qui assassine toutes ces personnes au cœur d'un Rajasthan à la chaleur harassante. Mais ce qui nous guide et nous anime tout au long du visionnage, ce sont les motivations du meurtrier. Et d'ailleurs, est-il vraiment seul ? Plusieurs mobiles nous apparaissent et de film de vengeance, Thar passe au film d'enquête.

Et c'est là qu'il gagne véritablement en intérêt et en impact.

Anil Kapoor est, comme toujours, absolument impeccable. L'acteur donne presque l'impression que c'est trop facile, que c'est simplement naturel. Il est LA star de Thar sans le moindre doute. Face à lui, son fils Harshvardhan délivre une prestation honorable, même si j'ai regretté le manque de subtilité de son jeu par moments. L'écriture de Raj Singh Chaudhary et d'Anurag Kashyap (qui a officié en tant que dialoguiste sur le métrage) passe énormément par l'image, par le langage non verbal de ses personnages. Et là, en revanche, je dois avouer que les yeux d'Harshvardhan savent transmettre les multiples tourments du protagoniste qu'il incarne. On cerne effectivement assez vite qu'il n'est pas qu'un sadique qui prend plaisir à tuer. Qu'il est habité par une soif de justice, de revanche qui le consume. Mukti Mohan est quant à elle très juste dans un rôle secondaire mais important, tandis que Fatima Sana Shaikh remplit son contrat en femme bernée par les prédateurs qui l'entourent.

En somme, Thar, les trois cibles est un néo-western assez efficace, à la violence gore parfois gratuite qui n'est pas sans rappeler les premiers films de Tarantino (et je ne sais pas dire si c'est une bonne chose tant j'ai personnellement du mal avec ce genre de séquences de porn torture). J'ai cela dit apprécié l'œuvre pour la mise en scène aérienne de Raj Singh Chaudhary, pour le message du film et surtout, pour le grand Anil Kapoor.

LA NOTE: 3/5
mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?