Bolly&co Magazine

#22 - Shahrukh Khan devient la cible de Modi ? Vijay et Ajith s’affrontent, Tollywood adapte la mythologie hindoue…

16 janvier 2023
podcast bollywood namaste le cinema bollyandco episode 21


Namaskar, Vanakkam, Namaskaram, Sat Sri Akal, Nomoshkar, Namaste le cinéma !

Asmae Benmansour-Ammour : Nous sommes le lundi 16 janvier 2023, et voici les actualités du grand et du petit écran indien, décryptées en exclusivité par Bolly&Co…

Elodie Hamidovic : Salut, salut ! Comment ça va, Asmae ?

Asmae Benmansour-Ammour : Salut Elodie ! Écoute, c’est toujours aussi génial de te retrouver chaque semaine pour évoquer ensemble les nouvelles croustillantes de nos stars préférées…

Elodie Hamidovic : Carrément ! D’ailleurs, je crois que tu nous as préparé un sujet brûlant…

Asmae Benmansour-Ammour : Je suis démasquée ! Puisque cette semaine, je suis tombée sur un article du Courrier International titré “La rébellion silencieuse de Shahrukh Khan”, qui reprend justement la Une du magazine indien The Caravan, mettant à l’honneur le célèbre Badshah de Bollywood. L’écrit revient justement sur le contexte politique indien depuis l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi, qui a vu une montée inquiétante de l’obscurantisme. La star, qui ne s’est jamais ouvertement exprimée contre ce phénomène, mènerait selon cet article une lutte silencieuse puisque, je cite, il ne se prêterait pas aux “éloges flatteurs du gouvernement Modi.”

Elodie Hamidovic : Effectivement, quand je pense aux personnalités qui sont ouvertement pro-Modi, ce n'est pas lui qui me vient en tête…

Asmae Benmansour-Ammour : Moi aussi. D’autant que Shahrukh Khan, au-delà d’être une immense vedette de cinéma, c’est tout un symbole. Un indien de confession musulmane, issu de la classe moyenne sans aucune ascendance dans l’industrie, qui plus est marié à une hindoue… C’est l'illustration même de l’Inde multiculturelle et pluraliste ! Pour autant, il est à mon avis important de nuancer le propos de l’article. Car comme tu t’en doutes, j’ai mené ma petite enquête…

Elodie Hamidovic : Mais quelle petite fouine…

Asmae Benmansour-Ammour : Car lorsqu’on parcourt le compte Twitter de SRK, on se rend rapidement compte qu’il s’est tout de même livré à ce jeu de dupes envers Monsieur Modi. Des messages d’anniversaire, des selfies avec le premier ministre, des tweets dans lesquels il déclare, et je cite de nouveau “votre implication dans le bien-être de notre pays et de ses habitants est hautement appréciée. Que vous ayez la force et la santé d’atteindre tous vos objectifs.”

Elodie Hamidovic : Et merde… SRK est passé du côté obscur de la force ?

Asmae Benmansour-Ammour : Attends, le message n’est pas terminé. Il conclut en disant “Prenez votre journée et profitez de votre anniversaire, Monsieur…”. Je te laisse juge du potentiel sous-texte d’une telle conclusion…

Elodie Hamidovic : Oui, Monsieur le Ministre, prenez des vacances… De looooongues vacances ! Ça soulagera tout le monde !

Asmae Benmansour-Ammour : En tout cas, on sait que les grandes vedettes qui refusent de promouvoir les idées du gouvernement en place subissent des pressions. Et Shahrukh n’y a pas échappé puisqu’en octobre 2021, son fils Aryan a été écroué de manière franchement fallacieuse dans une affaire de trafic de drogue, passant un mois derrière les barreaux. Les poursuites ont finalement été abandonnées en mai 2022, faute de preuve…

Elodie Hamidovic : J’imagine que c'est une nouvelle façon de faire pression sur lui ?

Asmae Benmansour-Ammour : C’est ce qu’on est en droit de se demander. D’autant que ce n’est pas terminé. Car on en a déjà parlé, le film du grand retour de la star, Pathaan, sortira le 25 janvier prochain. Et dès le début des actions de promotion, de nombreux appels au boycott ont été lancés sur les réseaux. Pire, puisque la violence a pris une autre dimension avec la sortie du clip “Besharam Rang”. Et si ce morceau ne vous dit rien, en voici un extrait… Cette chanson sexy a en tout cas sonné comme une infâme provocation pour des représentants du BJP qui, rappelons-le, constitue le parti au pouvoir. Ces derniers se sont effectivement offensés du morceau, allant de tweets assassins aux dépôts de plainte. L’un d’eux a même déclaré publiquement qu’il n’hésiterait pas à brûler vif Shahrukh Khan.



Elodie Hamidovic : Mais ils sont malades !

Asmae Benmansour-Ammour : Oui, une telle virulence, tout ça pour une chanson… L’objet de la controverse ? Une ligne du titre, qui déclare que l’héroïne porte les couleurs de l’impudence tout en arborant une robe de couleur safran. Certains extrêmes n’ont évidemment pas tardé à faire le rapprochement avec le drapeau indien, dont le safran représente la force et le courage du peuple. Aussi, cette couleur tient une symbolique importante dans la religion hindoue puisque les sages et dévots hindous la portent pour marquer leur religiosité.

Du coup, tu comprends que voir Deepika Padukone porter cette couleur sur sa robe de plage tout en faisant les yeux doux à Shahrukh Khan, c’était forcément trop violent pour leurs âmes sensibles…

Elodie Hamidovic : Oh, les pauvres… Non mais franchement, c’est quoi cette polémique en carton ? On dirait qu’ils ne savent plus quoi inventer pour se faire remarquer…

Asmae Benmansour-Ammour : Mon avis est très clair sur la question : c’est juste un nouveau moyen de pression qui est employé sur Shahrukh. D’autant que le CBFC, le bureau de censure indien a exigé des changements dans la ‘final cut’ du film, séquences musicales incluses… Le président du CBFC, Prasoon Joshi, déclare effectivement que “notre culture et notre foi sont glorieuses, complexes et nuancées. Et nous devons nous assurer qu'elles ne soient pas définies par des futilités.”

Elodie Hamidovic : Whaaaat ? Nan, c’est chaud !

Asmae Benmansour-Ammour : Tel est le contexte actuel pour tous les artistes indiens. Car n’oublions pas que Pathaan est un symbole fort au cœur d’un Bollywood de plus en plus formaté par la propagande : un film grand public avec une superstar musulmane à sa tête, dont le titre est très connoté puisqu’il désigne les personnes originaires d’Afghanistan et du Pakistan…

Elodie Hamidovic : Du coup, on peut clairement se demander si ce ne serait pas dans l’intérêt du gouvernement d’assurer l’échec d’un tel film, qui ne semble pas entrer dans leurs cases…

Asmae Benmansour-Ammour : A notre niveau, et malgré tous les doutes qu’on a pu exprimer concernant l'œuvre en elle-même, on ira voir Pathaan en salles, d’abord pour soutenir Shahrukh Khan à l’occasion son comeback, mais surtout pour que l'extrême droite indienne ne gagne pas…

Mais en attendant la sortie de ce film, il y a plusieurs métrages exaltants à découvrir en ce moment, n’est-ce pas, Elodie ?

Elodie Hamidovic : Absolument ! On a une semaine chargée avec deux énormes films qui se font face dans les salles, qui voient s’affronter deux immenses fanbases et deux vedettes incontournables de Kollywood : Vijay et Ajith. Le premier est à l’affiche de Varisu, sorti le 11 janvier avec Friday Entertainment. Le second est quant à lui la star de Thunivu, sorti le même jour grâce à Night ED Films.

Asmae Benmansour-Ammour : Les critiques des deux films sont d’ores et déjà disponibles sur Bollyandco.fr

Elodie Hamidovic : Sur nos plateformes de SVOD favorites, on a aussi de quoi titiller votre curiosité… Si vous avez vu la bande-annonce de Shehzada, sortie il y a quelques jours avec Kartik Aaryan à sa tête, découvrez le film dont il s’inspire, le blockbuster télougou alors attention… Ala Vaikunthapurramuloo ?

Asmae Benmansour-Ammour : Ala Vainkunthapurramuloo. Tu y étais presque.

Elodie Hamidovic : Merci, à tes souhaits ! C’est disponible depuis le 12 janvier sur Netflix.

Asmae Benmansour-Ammour : Histoire de voir si un remake était vraiment nécessaire…

Elodie Hamidovic : Avec un nom pareil, j’suis pas sûre !

Asmae Benmansour-Ammour : Ils ont eu au moins le mérite de le raccourcir, c’est déjà ça !

Elodie Hamidovic : Bon, soyons plus sérieuses… Enfin, vous pouvez aussi découvrir la série dramatique Trial by Fire avec Abhay Deol et Rajshri Deshpande, qui est également disponible sur Netflix depuis le 13 janvier.

Asmae Benmansour-Ammour : Et comme tu le sais, je dis toujours oui à Abhay !

Elodie Hamidovic : Et moi, je ne suis en principe jamais contre le fait de découvrir un nouveau film dravidien ambitieux.

Asmae Benmansour-Ammour : Moi non plus… Mais où veux-tu en venir, chère acolyte ?

Elodie Hamidovic : Eh bien, lundi dernier, quelques minutes après la sortie de notre 21ème épisode, je suis tombée sur la bande-annonce de Shaakuntalam, le prochain film de la superstar dravidienne Samantha.

Asmae Benmansour-Ammour : Ah je l’ai vu aussi ! C’était… étrange.

Elodie Hamidovic : Avant de te dire ce que j’en ai pensé, un peu de contexte... Le film est une adaptation de la pièce antique La Reconnaissance de Shakountala, écrite par le poète Kalidasa et datant semble-t-il du 4ème siècle.

Asmae Benmansour-Ammour : Ah oui, ça date vraiment !

Elodie Hamidovic : Son adaptation en langue télougoue est dirigée par Gunasekhar, acclamé en 1997 pour son film mythologique Ramayanam. Depuis, il a oscillé entre films du genre, comme Varudu et Rudhramadevi, et masala d’action comme Okkadu et Arjun

Asmae Benmansour-Ammour : Pour avoir vu Rudhramadevi et Varudu, j’ai le souvenir que c’était vraiment pas dingue, visuellement.

Elodie Hamidovic : La bande-annonce de Shaakuntalam donne effectivement l’impression de fonds verts récurrents, avec un montage daté et une théâtralité exacerbée, que l’on pourrait toutefois attribuer au fait que le film soit tiré d’une pièce.

Asmae Benmansour-Ammour : Et les effets visuels ne vendent pas du rêve, surtout quand on sait ce que le cinéma indien est désormais en capacité de faire…

Elodie Hamidovic : D’autant qu’il ne s’agit pas d’un projet de seconde zone, mais d’une fresque ambitieuse portée par l’une des plus grandes stars féminines du pays ! Le film compte également à sa distribution Dev Mohan, sur lequel on avait toutes bavé dans le drame malayalam Sufiyum Sujathayum, sorti en 2020.

Asmae Benmansour-Ammour : Et la musique de ce film… Pépite !

Elodie Hamidovic : Pour en revenir à Shaakuntalam, il s’inscrit dans une longue tradition de films mythologiques au cinéma télougou, particulièrement friand de ce genre de récits. Et si jusque-là, les plus gros succès de ce registre ont été portés par des stars masculines comme Balakrishna et NTR Jr, on sent depuis quelques années cette envie de mettre en avant des figures féminines de l’hindouisme ou de l’histoire indienne.

Asmae Benmansour-Ammour : Le risque, cela dit, c’est encore une fois que ces récits soient tordus et détournés pour servir un propos malsain. Comme c’était le cas du Manikarnika de Kangana Ranaut, port-étendard de la mouvance extrémiste de Modi.

Vous allez peut-être vous dire qu’on est chiantes avec ça, parce que c’est un sujet qu’on a martelé dans plusieurs épisodes de ce podcast… Mais vraiment, c’est hyper important de parler de ce qu’il se passe en Inde, et de la façon dont ça influence le septième art. Elodie et moi regardons des films indiens depuis assez longtemps pour nous être rendues compte du changement, et de la manière dont certains métrages manipulent la réalité pour propager leur idéologie. C’est d’ailleurs pour ça qu’on est aussi critiques envers de grandes figures populaires comme Akshay Kumar ou Ajay Devgan, qui jouent un jeu malsain dans un tel contexte.

Elodie Hamidovic : On espère donc sincèrement que Shakuntalaam, à défaut d’être un chef-d'œuvre, soit au moins dépourvu de ce genre de discours.

Asmae Benmansour-Ammour : J’aurais pas dit mieux !

Elodie Hamidovic : Le film sortira en Inde le 17 février prochain à travers tout le pays et en 3D…

Asmae Benmansour-Ammour : J’espère que ça fera pas mal aux yeux…

Elodie Hamidovic : Et c’est tout pour aujourd’hui, merci de nous avoir écouté.

Asmae Benmansour-Ammour : C’est sur la mélodie de “Jhoome Jo Pathaan” du film Pathaan que l’on se quitte. L’occasion pour moi de vous encourager à prendre votre place pour ce blockbuster du King Shahrukh Khan, qui sortira en France le 25 janvier grâce au distributeur Desi Entertainment Paris.



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Elodie Hamidovic : Nous serons ravies de vous lire ! On se retrouve lundi prochain avec plus d’infos, bonne semaine à tous !

Asmae Benmansour-Ammour : Et surtout n’oubliez pas : Namaste, le cinéma !

Crédits :



Hosts : Elodie Hamidovic & Asmae Benmansour-Ammour
Texte : Elodie Hamidovic & Asmae Benmansour-Ammour
Retranscription : Asmae Benmansour-Ammour
Design : Elodie Hamidovic
Montage et mixage son : Elodie Hamidovic