Critique : Mere Dad Ki Maruti (★★★★☆)

dimanche 18 juin 2023
Mere Dad Ki Maruti critique bollywood
— Cet article a été publié dans le numéro 7 de Bolly&Co, page 38.

Début 2013, la bannière de production Y Films (sous-branche de la maison Yash Raj qui lance de jeunes comédiens sur la scène cinématographique) a financé la comédie Mere Dad Ki Maruti, après le succès de sa précédente production Mujhse Fraaandship Karoge. Le jeune Saqib Saleem signe ainsi son second métrage après que le film précité ait lancé sa carrière à Bollywood. Toujours dans un registre léger, Mere Dad Ki Maruti le met réellement sur le devant de la scène, alors qu’il devait partager l’affiche avec un gros casting dans Mujhse Fraaandship Karoge. Mere Dad Ki Maruti a excellé au box-office et a été bien reçu par la critique. Pourtant, en matière de comédie, la concurrence était rude : Chashme Buddoor, Nautanki Saala et Jolly LLB sont en effet sortis à la même époque.

Alors, Mere Dad Ki Maruti sort-il finalement du lot ?



Sameer (Saqib Saleem) veut frimer devant les copains, prouver à son meilleur ami Gattu (Prabal Panjabi) qu’il n’est pas un naze et veut surtout taper dans l’oeil de la belle Jasleen (Rhea Chakraborty), coqueluche du bahut qui se présente comme la « Shakira de Chandigarh ». Cependant, il est difficile de garder un semblant de crédibilité quand on voyage en rickshaw et en bus, inutile de songer à de quelconques rendez-vous galants dans ces conditions. Pourtant, le miracle se produit et Jazz propose à Sameer de passer la prendre dans la soirée afin qu’ils puissent faire connaissance. Mais Sameer n’a pas de voiture. Et comme il est très malin, il se dit qu’il va emprunter la Maruti qui est dans le garage de ses parents, et qui doit faire office de cadeau de mariage à sa sœur Tanvi (Benazir Shaikh) et son fiancé Raj (Karan Mehra). Et comme il est vraiment très malin, il perd la voiture juste après sa virée nocturne. Le mariage est imminent, Sameer informe Gattu de la situation en espérant qu’ils parviennent à trouver une solution...

On sent que la bannière de production a voulu surfer sur le carton de Mujhse Fraaandship Karoge en engageant Saqib Saleem pour le rôle principal. D’ailleurs, le projet a été annoncé quelques semaines à peine après la sortie du film de Nupur Asthana. Saqib a fait une telle impression qu’il a été nommé pour le prix du Meilleur Espoir.

Mais la première différence notable entre Mujhse Fraaandship Karoge et Mere Dad Ki Maruti, c’est le genre.

Si le premier était une romcom assumée, le second s’inscrit directement dans le registre de la comédie. Une heure et quarante-cinq minutes de rebondissements, de pitreries et de maladresses entièrement assurés par le trio Saqib/Prabal/Rhea. Le film est rythmé, efficace. L’humour est parfaitement dosé, sans excès ni improbabilités. On n’est absolument pas dans la même atmosphère que dans les réalisations de David Dhawan ou de Sajid Khan. Ici, les dialogues sont intelligents et les situations assez cocasses pour déclencher le rire. Nul besoin n’a été d’y ajouter des farces bourratives et surfaites comme le cinéma hindi sait pourtant si bien en concocter.

L’ambiance de Mere Dad Ki Maruti est équilibrée, d’où le fait que le film soit assez court pour une œuvre indienne (1h45 correspond plutôt au format standard occidental). La réalisatrice Ashima Chibber a eu le bon sens de ne pas vouloir tirer en longueur une intrigue assez mince et a su la mettre suffisamment en valeur pour nous divertir le temps imparti.

La première force du film réside dans son protagoniste, interprété sans fausse note par Saqib Saleem.

Il campait déjà un adolescent un peu gauche dans Mujhse Fraaandship Karoge, et ce type de personnages aussi maladroits que charmants lui vont comme un gant. Sa gueule d’ange, son charisme et son énergie transparaissent complètement à travers Sameer. Mais le jeune acteur ne serait rien sans l’hilarant Prabal Panjabi, toujours aussi succulent dans le rôle du copain décalé qu’on lui connaissait déjà dans Mujhse Fraaandship Karoge. La déception vient de Rhea Chakraborty. Après des débuts passés inaperçus dans le film télougou Tuneega Tuneega, cette ancienne animatrice tente sa chance à Bollywood avec ce film qui ne lui laisse pourtant que très peu d’espace. Sans doute, la perspective de tourner avec la maison Yash Raj l’a-t-elle convaincue d’accepter ce rôle sans grand enjeu. En effet, le personnage de Jasleen est le plus mal écrit de tous (et au passage, le seul à être concrètement bancal).

De bombe écervelée et superficielle, elle devient une amie sincère et profonde. Le spectateur comprend difficilement ce changement brutal de comportement, qui ne coïncide aucunement avec l’un des événements de l’intrigue. Pourtant, Rhea est plutôt attendrissante, avec ses faux airs de Genelia Deshmukh et ses grands yeux noirs. Mais elle ne parvient pas à assurer ce personnage esquissé, semblant exister uniquement pour combler le vide affectif du héros masculin.

Parmi le reste de la distribution, Ram Kapoor est exceptionnel mais tellement sous-employé en père hystérique, économe à l’excès et follement épris de sa voiture.

On regrette que sa prise de poids ait réduit ce comédien génial aux rôles de père, et ce alors qu’il n’a que 39 ans. En effet, il était aussi le paternel autoritaire de Varun Dhawan dans Student of the Year, en 2012. Si les fans veulent le découvrir dans un rôle de plus grande envergure, il est fantastique en quadragénaire allergique à l’amour dans la série Bade Achhe Lagte Hain, face à Sakshi Tanwar. Benazir Shaikh et Karan Mehra composent quant à eux le charmant couple de mariés qui sauve Sameer de la galère. Le brillant Ravi Kishan incarne avec aplomb le gangster du coin qui terrorise notre bande d’amis dépassés.

Ce qui ressort également de Mere Dad Ki Maruti, c’est l’ambiance punjabi qui en émane.

Si le film est en accord avec son temps à coups de SMS, de vidéo-conversations sur Ipad et de lecteurs MP3, il reste une comédie très indienne. Et cela se ressent aussi bien dans les décors et dans les tenues que dans la musique. L’album est composé par Sachin Gupta, que l’on connaît surtout pour la bande-son immanquable du film Prince, avec Vivek Oberoi. Il réalise avec Mere Dad Ki Maruti une bande-originale irréprochable aux accents punjabi imparables. Le titre le plus accrocheur est sans nul doute « Punjabiyaan Di Battery », interprété par Mika Singh et le rappeur Yo Yo Honey Singh. Le titre dansant « Haaay » de Punjabi MC introduit le personnage de Sameer tandis que la chanson titre « Mere Dad Ki Maruti » de Diljit Dosanjh et Sachin Gupta sert de musique de fond aux aventures de notre trio infernal. Il est intéressant de noter que Mere Dad Ki Maruti n’a eu nul besoin d’une demoiselle du calibre de Malaika Arora ou de Katrina Kaif pour animer le spectateur, car l’item number du métrage est ici exécuté par Benazir Shaikh sur la dynamique « Hip Hip Huraah ». Finalement, seul « Main Senti Hoon » sonne plutôt occidental, avec tout de même ce je ne sais quoi de très indien dans l’instrumentalisation qui fait son charme.

En conclusion



Ce qu’on retient du visionnage de Mere Dad Ki Maruti, c’est le travail de Saqib Saleem et de Ram Kapoor, les chansons de Sachin Gupta, le rythme soutenu de l’histoire et sa conclusion franchement inattendue. Que vous soyez déjà fan de Saqib Saleem ou que vous soyez tenté par l’expérience, Mere Dad Ki Maruti est donc une comédie fraîche et distillée qui se déguste aussi agréablement qu’elle ne se digère, car vous garderez de bons souvenirs de cette production Yash Raj modeste mais réussie.

LA NOTE: 4,5/5
mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?