Kill, le film de castagne que vous attendiez ?

jeudi 22 août 2024
Critique du film hindi Kill réalisé par Nikhil Nagesh Bhat avec l'acteur Lakshya
Kill, présenté comme le revenge movie évènement de l’année à Bollywood, sortira en France le 11 septembre prochain avec le distributeur Originals Factory. Et pour l’occasion, j’ai eu l’immense privilège de découvrir le film il y a quelques semaines dans le cadre d’une projection presse très privée. D’autant que depuis qu’il a été présenté au Festival du Film International de Toronto en 2023, Kill jouit d’un excellent bouche-à-oreille et est d’ores et déjà considéré comme l’un des meilleurs métrages hindi de l’an.

Toutefois, qu’en est-il réellement ? Kill est-il LE film de genre que le cinéma indien attendait désespérément ?



Amrit (Lakshya, dans son premier rôle au cinéma) est un commando follement amoureux de la douce Tulika (Tanya Maniktala), fille d’un riche homme d’affaires. Lorsqu’il apprend que sa belle est sur le point d’être mariée de force, Amrit embarque dans le même train qu’elle, sans s’imaginer qu’il devra faire face à un danger bien grand, en la personne de Fani (Raghav Juyal), un voyou sans scrupule…

Kill est réalisé par Nikhil Nagesh Bhat, qui nous a livré en 2018 la sympathique satire Brij Mohan Amar Rahe avant de réaliser l’effroyable bouillie de propagande Hurdang, en 2022. Il se rattrape partiellement l’année suivante avec le thriller Apurva, qui semble poser les bases de ce que sera Kill, à savoir un film de vengeance dans lequel le (ou la) protagoniste est plus éprouvé(e) que jamais. Avec Kill, il livre un métrage en deux actes, avec deux tons et deux cadences. Malgré les égarements précités, le réalisateur revient donc à un récit brut et direct. Pas de message subliminal, ni de politique douteuse. Kill est un pur ‘revenge movie’, comme le cinéma hong-kongais sait si bien les faire.

Toutefois, si le cinéma indien nous a habitué à des trajectoires narratives plus stylisées en se rangeant presque systématiquement du côté de la fin heureuse (cf RRR et Pathaan, par exemple), Kill nous prend de court à ce niveau.

Car si la mise en scène de Nikhil Nagesh Bhatt n’est pas fondamentalement novatrice, c’est l’écriture de son histoire - que l’on lui doit également - qui fait selon moi la différence. Puisque si ce qui est attendu par le registre nous est bien livré, le réalisateur prend le contre-pied des différents trope du genre pour mieux nous assommer par la puissance de son récit. Du meilleur ami sacrifié à la femme dans le frigo (concept notamment récurrent dans les ‘origin stories’ de nombreux super-héros), Kill se nourrit de l’essence même de son univers pour servir son histoire et, plus que tout, son héros.

Pour autant, Kill est également truffé d’éléments récurrents dans les films d’action indiens : une romance doucereuse, quelques mélodies et une jolie demoiselle en détresse. Nikhil Nagesh Bhat martèle donc, à travers cela, l’identité profondément indienne de son métrage.

Avec cette œuvre, on assiste effectivement à la déchéance du protagoniste qui, à mesure que la fatalité s’abat sur lui, se transforme en véritable machine à tuer. La trame ne cherche cependant jamais à le glorifier, ni à présenter ses actions comme héroïques. On voit Amrit rongé par le mal, habité par une rage destructrice qui le dépasse et dont il ne prend jamais la pleine mesure. Et quand on se dit que le film a atteint ses limites - notamment en termes de gore - , il les foudroie allègrement.

La prestation de Lakshya est en tout cas pour beaucoup dans la réussite de Kill. Alors connu à la télévision pour ses participations à plusieurs séries, Lakshya tient son premier rôle au cinéma avec Kill, qu’il porte largement sur ses solides épaules. S’il s’est taillé une impressionnante musculature pour ce rôle de soldat surentrainé, il n’en a pas oublié d’incarner généreusement son personnage (vous savez qui je vise du regard en écrivant ces mots, pas besoin d’insister…). Car le jeune homme donne à voir un Amrit en pleine mutation, nous faisant entrer en totale empathie avec lui malgré le caractère particulièrement violent de ses actes. Et c’est selon moi ce qui fonctionne dans Kill : le fait qu’on se mette aisément à la place d’Amrit de par son indubitable humanité, le tout loin de toute glorification malsaine.

De son côté, Tanya Maniktala, révélée par la série britannique Un garçon convenable, est cruellement attachante dans le rôle de Tulika, bien qu’on puisse regretter que son personnage ne prenne pas davantage de place dans la narration. Abhishek Chauhan est également impeccable en allié et ami fidèle d’Amrit, si bien qu’on n’a qu’une seule envie : le retrouver dans d’autres films qui sauront le mettre en valeur.

Raghav Juyal est quant à lui glaçant dans la peau de Fani, le principal antagoniste de l’histoire.

Danseur de formation, Raghav s’est depuis imposé comme l’un des acteurs les plus prometteurs de la nouvelle génération. Avec Kill, il étoffe sa palette de jeu et prouve que malgré sa bouille d’ange, il est parfaitement crédible en kidnappeur impitoyable. La chorégraphie martiale de Se-Yeong Oh et Parvez Sheikh, qui ont notamment travaillé sur le film hindi War, est ici d’une efficacité redoutable. D’autant que la mise en scène ne cherche pas à faire dans le beau mais à faire dans le vrai. On ressent donc chaque impact, chaque coup, chaque lame qui transperce la peau et cela rend l’expérience encore plus marquante. Pas toujours agréable pour une hypersensible comme moi, mais on peut en tout cas reconnaître la nature plus que vraisemblable des scènes d’action, qui m’ont donnée mal au ventre à de nombreuses reprises.

En conclusion



Kill est un film fait pour le grand écran. Il serait donc vraiment regrettable que vous passiez à côté de l’opportunité de le voir en salles obscures dès le 11 septembre, avec le distributeur Originals Factory. Encore merci à eux de m’avoir donné l’opportunité de découvrir ce film saisissante en exclusivité…
LA NOTE: 4/5

mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?