Bolly&co Magazine

Rencontre avec Mayur Puri : Lost and Found in Kumbh est une déclaration d’amour à l’humanité.

20 mai 2025
inde cinéma indien festival de cannes Rahul Bhat Lost and Found in Kumbh
Présent à Cannes pour dévoiler la bande-annonce de son premier long-métrage en tant que réalisateur, Lost and Found in Kumbh, Mayur Puri - connu pour ses travaux de scénariste et parolier à Bollywood - évoque sa transition vers la réalisation et les origines profondes de son projet.

Bolly&Co : Bonjour Mayur ! Avant, toute chose, merci de nous faire l'honneur de votre présence : Vous êtes connu pour votre polyvalence en tant que scénariste, parolier et désormais réalisateur. On vous doit les histoires de films comme Om Shanti Om et Happy New Year ainsi que les paroles de certains des plus gros tubes de Bollywood Comment cette diversité artistique a-t-elle façonné votre parcours dans l’industrie cinématographique indienne ?

Mayur Puri : C’est un long parcours. Je suis surtout connu pour mon travail dans le cinéma bollywoodien au service de gros blockbusters commerciaux. Mais au fond de moi, j’ai toujours ressenti une lutte intérieure, une envie de raconter des histoires très personnelles. Aujourd’hui, après toutes ces années, j’ai enfin pu prendre le temps pour écrire ce que j’avais vraiment envie d’écrire. C’est ce que j’ai fait avec ce film. J’avais un délai très court, mais je tenais absolument à raconter cette histoire. C’est essentiel : en tant que créateur, il faut toujours se demander quelle est l’histoire que l’on veut raconter.

B&C : Qu’est-ce qui vous a poussé à raconter Lost and Found in Kumbh ? Qu’est-ce qui rend cette histoire si spéciale pour vous ?

MP : C’est une émotion universelle : la peur d’être perdu. Mais en réalité, on n’est jamais vraiment perdu, on est toujours quelque part. Ce qui fait peur, ce n’est pas l’égarement physique, c’est d’être séparé des gens qu’on aime, de ceux qu’on connaît. C’est cette perte du lien, de la chaleur humaine. Cela montre bien que nous sommes fondamentalement des êtres sociaux. Et qu’y a-t-il de plus symbolique que le Kumbh Mela, avec ses 600 millions de personnes rassemblées ? Je voulais explorer ce que signifie être perdu… et ce que signifie être retrouvé.

B&C : Le film bénéficie d’un casting impressionnant. Comment Rahul Bhat, Katie Amess et Rajshri Deshpande ont-ils rejoint l’aventure ?

MP : Rahul est un ami très proche depuis plus de 15 ans. En 2016-2017, c’est lui qui m’a poussé à réaliser mon premier court-métrage Firdaws, dans lequel il jouait. Il m’a dit : « Si tu ne peux pas faire un long-métrage, fais un court. » Je pensais alors que les courts-métrages étaient pour les débutants ou les gens en difficulté. (rires) J’avais tort. J’ai découvert un format unique, exigeant et riche. Depuis, Rahul et moi avons toujours voulu retravailler ensemble. Quand ce projet s’est concrétisé, ce n’était pas une question de lui proposer, mais de le prévenir qu’il allait en faire partie.

Pour Katie, c’était particulier : elle a accepté le projet sans connaître le scénario, juste sur la base de l’idée. Elle a ensuite lu le script, mais elle était déjà embarquée. Rajshri, quant à elle, avait remporté un prix pour sa performance dans la série Trial by Fire. Je voulais absolument la rencontrer ! Et dès notre premier café ensemble, elle m’a dit oui avant même que la commande arrive. J’ai eu beaucoup de chance d’être entouré d’acteurs qui me font à ce point confiance. Et puis il y a les véritables stars du film : les deux jeunes garçons Jordy Cass et Abhisar Puri. Sans eux, le film n’aurait pas existé.

B&C : Le tournage a eu lieu pendant le Kumbh Mela, un événement gigantesque. Quels ont été les défis principaux auxquels vous avez été confrontés ?

MP : Certains plans ont été tournés pendant le véritable événement, avec la foule réelle. Mais tourner une fiction dans le Kumbh pendant les grands jours, c’est pratiquement impossible : logistique infernale, sécurité, autorisations… C’est plus simple de tourner sur la Lune ! On a donc aussi tourné juste après les jours forts, quand l’installation était encore en place. Cela nous a permis de créer une ambiance très réaliste, en reconstituant certains décors et costumes avec beaucoup d’authenticité. D'autant que le film a été tourné en seulement 16 jours et avec une seule caméra.

B&C : Impressionnant ! Vous avez connu un immense succès dans le cinéma hindi mainstream. Qu’est-ce qui vous a poussé à franchir le pas vers la réalisation de ce premier long-métrage ?

MP : Quand l’art est ta vie, tu penses toujours à deux choses : la forme et le fond. Le contenu dicte la forme. Ce film devait être tourné de manière réaliste. Il ne pouvait pas être stylisé, théâtral. Tout devait être vrai : les lieux, les gens, leur manière de parler et de se comporter. Ce n’est pas moi qui choisis la forme du film. Ce sont les personnages, l’idée elle-même, qui me guident. Moi, je ne fais que suivre.

B&C : Qu’est-ce qui vous inspire à raconter une histoire ? Est-ce une rencontre, une émotion, un lieu ?

MP : Cela dépend. Parfois c’est un personnage, parfois une scène, parfois une simple idée. Pour Lost and Found in Kumbh, c’est cette idée de revisiter un vieux cliché du cinéma indien : dans les films des années 1970-1980, les frères se perdaient toujours à la foire de Kumbh. Mais on ne montrait jamais le Kumbh. Moi, je voulais raconter cette histoire-là, mais de manière réaliste, contemporaine et surtout universelle. C’est un bel équilibre entre la nostalgie de notre cinéma d’enfance et une narration plus moderne.

B&C : Enfin, vous avez travaillé sur ce film avec votre famille : votre épouse Ulka et votre fils Abhisar y participent. Comment cela a-t-il influencé votre manière de travailler ?

MP : Ce n’est pas parce que ce sont mes proches qu’ils sont dans le film. Ce sont des professionnels reconnus, talentueux. Mon fils Abhisar, par exemple, a déjà joué dans une dizaine de courts-métrages. Il est très demandé, même par les étudiants en cinéma de l'école dans laquelle j’enseigne. Il fait son propre chemin. Travailler avec eux a été naturel et je suis resté concentré sur mon rôle de réalisateur. L’émotion était là et j'étais très fier d'eux, mais c’est avant tout un travail d’équipe, très professionnel et appliqué.

B&C : Mayur, un grand merci pour cet échange et je vous souhaite plein de réussite pour Lost and Found in Kumbh !

MP : Merci beaucoup, Asmae, c'était un plaisir !

mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?