Critique : Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan (★★☆☆☆)

mercredi 26 avril 2023
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Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan est LA sortie de cette fête de l'Aïd, menée par la superstar hindi Salman Khan. Cela dit, depuis plusieurs années, la qualité des films proposés par l'acteur est en chute libre, bien loin de ses essais concluants pour Bajrangi Bhaijaan (2015), Sultan (2016) ou même Tiger Zinda Hai (2017). Je savais donc parfaitement où je mettais les pieds en allant voir ce métrage, qui constitue par ailleurs un remake du métrage tamoul Veeram. Mais c'est ici presque anecdotique, car le réalisateur Farhad Samji se sert de l'histoire comme prétexte pour glorifier Sire Salman et respecter scrupuleusement son cahier des charges !

Car effectivement, si vous ne l'aviez pas encore compris, un métrage de/pour Salman Khan doit compter les éléments suivants. Alors, prêts pour la checklist ?



Une scène d'introduction poussive et toujours plus ridicule
Un gros plan sur son bracelet trop large
Une co-star féminine plus grande et (surtout) plus jeune que lui
Une chanson interprétée par Salman et dopée à l'autotune
Un méchant pas du tout charismatique
Des répliques de louanges à la gloire de son altesse Salman
Une séquence dans laquelle il tombe inévitablement la chemise

Maintenant qu'on sait à quoi s'attendre, il faut savoir que Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan est avant tout un film paresseux.

Les multiples références aux anciens métrages de l'acteur comme à sa vie personnelle traduisent surtout l'absence d'une trame réellement engageante. Mais dans son infinie fainéantise, l’œuvre surfe sur la tendance des blockbusters pan-indiens en implantant une partie de son intrigue dans le sud du pays. Ainsi, on voit Salman et ses compères arborer le dhoti (qu'ils qualifient malencontreusement de lungi…) et danser à l'occasion du festival des fleurs de Bathukamma. Hélas, tout cela ne dépasse jamais le stade du clin d’œil oubliable tant rien ne sert l'histoire faiblarde qu'on essaie vainement de nous vendre !

D'ailleurs, au cas où, comme moi, vous voyez des films pour qu'on vous raconte des choses, voici le pitch aussi superficiel qu’inintéressant de Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan ! Un célibataire endurci, que tous appellent Bhaijaan (Salman Khan), fait la promesse de ne jamais se marier pour maintenir l'équilibre familial. Mais ses frères Love (Siddharth Nigam), Ishq (Raghav Juyal) et Moh (Jassie Gill) ne l'entendent pas de cette oreille... Eux qui avaient alors fait vœu de célibat doivent annoncer à leur aîné qu'ils ont chacun trouvé une amoureuse ! Et au passage, ils mettent tout en œuvre pour que leur Bhaijaan tombe sous le charme de la jolie Bhagya (Pooja Hegde)…

Si le casting de Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan est énorme, avec la présence notable des vedettes télougoues Venkatesh et Jagapathi Babu, il ne tient aucune place tant tout est fait pour que Salman soit sublimé au maximum !

Ni le sympathique Jassie Gill, ni l'attachante Bhumika Chawla (qui jouait l'amoureuse de Sallu dans Tere Naam en 2003) ne servent à grand-chose. De même pour les trois comédiennes qui font leurs débuts à Bollywood avec ce film : Shehnaaz Gill (ancienne vedette de télé-réalité), Palak Tiwari (fille de l'actrice Shweta Tiwari) et Vinali Bhatnagar (candidate à Miss Inde) sont tout au plus mignonnes, mais n'ont aucune fonction narrative ! Même Pooja Hegde, dulcinée fictive de Salman, ne sert qu'à combler le vide affectif de l'existence du héros. Aucun enjeu, aucune personnalité… Rien qui ne nous donne réellement envie de les suivre et de les soutenir. Ce sont des coquilles vides, et on ne leur en demande pas plus !

Salman Khan est fidèle à lui-même depuis quelques temps : en sous-régime ! Tous ses personnages récents semblent être des extensions de lui-même, ou en tout cas de ce qu'il représente pour le public. Car depuis très longtemps, Salman Khan est surnommé « Bhai », ou frère en hindi. Cette appellation affectueuse est notamment associée au fait que l'acteur ne se soit jamais marié, et qu'il soit tel le frère du peuple. Aussi, ses actions caritatives par le biais de sa fondation Being Human sont venus renforcer cette image très glorieuse de l'acteur. Si bien qu'il ne semble même plus jouer la comédie, encore moins servir un personnage. Avec Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan, il atteint cependant le stade de l'auto-parodie, ultime tentative de valoriser l'acteur en plein déclin ! Le comédien nous gratifie par ailleurs de looks aussi improbables que risibles, change de coupe de cheveux plusieurs fois dans la narration pour mieux nous rappeler que le ridicule ne tue pas !

Et non, la perruque chelou de Salman Khan n'est pas ce qu'il y a de pire dans Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan !

Car Farhad Samji nous livre un métrage daté en tous points, ponctué de blagues racistes, de placements de produits hasardeux et de punchlines qui font plouf. Les répliques sont d'un amateurisme particulièrement confondant, faisant passer les films de série B de Mithun Chakraborty pour de la grande littérature ! Si la photographie de V. Manikandan réserve quelques (trop rares) surprises avec des plans assez intéressants, elle est écrasée par un montage épileptique et une mise en scène inexistante.

Le seul véritable atout de Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan réside selon moi dans sa musique, composée par une pléiade d'artistes, d'Amaal Mallik à Devi Sri Prasad, en passant par Sukhbir et Payal Dev. Certaines mélodies comme « Naiyo Lagda », «  O Balle Balle » ou encore « Billi Billi » possèdent un parfum old-school absolument charmant, tandis que « Yentamma » et « Bathukamma », avec leurs accents sudistes, s'écoutent sans déplaisir. En revanche, fuyez les deux titres chantés par Salman, à savoir « Jee Rahe The Hum » (une ballade mièvre et outdated) et « Let's Dance Chotu Motu » (une comptine pour enfants malaisante).

En conclusion



Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan est très mauvais. J'ai en tout cas mis toute mon énergie à vous le démontrer (et à le démonter) dans cette critique. Et je n'y reviendrai pas. C'est une immense blague pour tout amateur de cinéma qui se respecte. Ce n'est pas même un bon divertissement, ni même un plaisir coupable. On ne peut pas non plus le qualifier de nanar tant il a coûté un bras. Et pourtant, je lui trouve une sincérité, une conscience de lui-même (et de sa propre médiocrité) qui le rend par instants assez touchant. Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan n'est pas cynique ni prétentieux. Il n'est pas non plus ambitieux pour un sou. Mais il a le mérite d'être vraiment honnête.

Kisi Ka Bhai Kisi Ki Jaan, depuis le 21 avril au cinéma. Une sortie Night ED Films

LA NOTE: 1,5/5
mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?