Quand Bolly&Co débarque à Cannes.

jeudi 1 juin 2023
festival cannes bollywood 2023
Pour la première fois de l’histoire de Bolly&Co, l’équipe est accréditée en tant que presse au Festival de Cannes. Oui, le fucking Festival de Cannes - pardonnez mon langage, c’est l’émotion ! Un vrai miracle de Noël à nos yeux, qui met évidemment une belle pression sur nos petites épaules de meufs qui veulent toujours bien faire. Notre objectif n’est donc pas de prendre des selfies avec nos stars favorites et d’enchainer les salles de cinéma, mais plutôt de faire des interviews de folie (même si elles durent 2 minutes top chrono), de capturer autant de clichés que possible (même s’il faut poireauter 6 heures devant un hôtel), de produire des critiques intéressantes (même s’il y a trop peu de films indiens dans le lot) et surtout - surtout - de comprendre comment le Festival fonctionne.

Car c’est évident, nous voulons revenir l’année prochaine, et les années suivantes. Et ainsi faire du Festival un rendez-vous annuel pour vous, chers lecteurs. Vous offrir du contenu exclusif et de très bonne qualité pour vous faire vivre l’évènement de la meilleure des façons.

Alors au final, ça donne quoi, ce premier festival ?



Avant de rouler des heures et des heures jusqu’au Palais des Festivals.

Après avoir passé l’ennuyante étape de la paperasse sur le site officiel, et avoir reçu une réponse positive vis-à-vis de nos accréditations, nous avions à peu près 2 mois pour trouver un logement décent, emprunter du matériel photo, convaincre nos boss d’accepter nos congés, faire nos valises pour deux semaines, économiser de la tune pour ne pas mourir de faim sur la Croisette, contacter notre réseau pour de potentielles infos sur nos célébrités favorites et se préparer mentalement à 10 heures de route entre le 95 et le 06. Oui, 10 heures. Maximum, avec les potentiels bouchons et autres travaux, car pour Asmae et moi-même, il était évident que nous aurions besoin de la voiture. Impossible de loger dans Cannes - à moins de vendre un rein - et même aux alentours tant les prix sont exorbitants. Dieu finit par entendre nos prières et après deux bonnes semaines de recherche, nous trouvons une pépite au cœur de Mouans-Sartoux, à 40 minutes en bus (la ville faisant office de terminus), 30 minutes en TER (on y est jamais monté, mais c’est un super plan de secours en cas de problème) et surtout 20 minutes en voiture de Cannes. Bonus : parking gratuit, wifi et même une belle piscine. Petit à petit, nos contacts nous aident, notre agenda commence à se remplir, l’excitation se fait plus grande et le départ approche… À 5h du matin, s’il vous plaît.

On va vraiment participer au Festival de Cannes ? Oui. Et comme je suis fascinée par le Festival depuis 2013 - l’année où Vidya Balan était membre du jury à Cannes et où le Cinéma Indien fêtait ses 100 ans - Asmae me faisait donc entièrement confiance en termes d’organisation. Événements, tapis rouges, soirées... En 10 ans, j’ai noté des habitudes. Le planning des égéries L'Oréal, les sélections parallèles, les galas habituels, les sponsors favoris… Bref, j’étais rodée. Cependant, suivre le Festival sur son canapé et le vivre sur place, ce n’est pas du tout la même chose. De même, le Festival m’a toujours semblé restreint. Ouvert à une certaine élite journalistique. Avec une hiérarchie dans ses accréditations qui, potentiellement, ne nous permettra pas de faire tout ce que l’on aimerait faire. Alors je me prépare déjà à un plan B : tourisme, lecture, écriture… Changer nos deux semaines de “boulot” en “vacances”.

Evidemment, mon plan B n’a servi à rien.

Nos repères indispensables pour survivre (et produire du contenu, évidemment). Très vite, on réalise deux choses : déjà, Asmae en tant que critique a plus de facilité à réserver ses places de ciné que moi, photographe. Logique, c’est elle qui va rédiger les critiques. Et si nos réveils quotidiens à 6h50 sont difficiles (il faut se connecter à 7h pour réserver les séances qui nous intéressent, et ce dans la limite des places disponibles et 4 jours avant ladite séance… Bref, tout un délire). Au moins, nous étions prêtes assez tôt et rapidement pour affronter nos journées. Ensuite, nous devions faire du repérage. C’est bien beau de faire des pins sur Google Map, mais une balade s’impose. On découvre ainsi les différents espaces mis à disposition de la presse au cœur du Palais des Festivals, dont la terrasse des journalistes (café, thé et sodas gratuits) qui, durant notre séjour, est clairement devenu notre coin de travail favori. Puis le village international, immense et divisé en trois zones autour du Palais. Notre futur repère s’y trouve : le Pavillon Indien.

Élément central de nos activités, le pavillon propose débats et conférences, révélations de projets en tout genre, et possède également une terrasse et un petit coin café à disposition. Bref, pour croiser les célébrités, c’est notre QG. Le planning est dispo sur leur site, mais peut être amené à changer à la dernière minute, alors avec Asmae, on garde un oeil et on tente de tout organiser autour de leur programme. Surtout, Asmae profite de chaque évènement pour aborder les agents ou même directement les célébrités. Toute occasion est bonne pour une possible interview, et elle distribue ses cartes aussi vite que son ombre. La rencontre avec Sara Ali Khan, dont on se disait qu’elle serait impossible à obtenir, c’est grâce à sa réactivité.

Ensuite, il y a les autres cinémas. Les petits écrans partenaires à quelques minutes du Palais, et l’immense Cineum a plus de 20 min de bus - et visiblement le seul endroit où j'arrive à choper des places, mais assez confortable comme endroit. Puisque s’organiser trop en avance relève de l’impossible, nous réservions les séances en amont quitte à annuler dès que nos priorités changeaient : une interview, une session photo ou un événement du pavillon valait plus qu'un film. Et comme souvent, il y a peu de temps entre le Cineum et les infos, j’ai donc dû courir et découvrir des chauffeurs pas contents face aux bouchons, qui refusaient de laisser les personnes sortir avant le prochain arrêt sous prétexte que ça allait à l’encontre de leur protocole… Oui, j’ai râlé et protesté plus d’une fois !

Enfin, il y a l’hôtel Martinez. Le cœur des égéries L'Oréal et autres influenceurs. Le centre névralgique pour les photographes du dimanche et autres professionnels afin de venir capturer des stars qui posent gentiment pour les fans. Notre première fois a été un véritable succès : Urvashi Rautela, Fagun Thakur et Esha Gupta y étaient. Grâce à Asmae, son oeil vif et sa voix de poissonnière (c’est elle-même qui le dit comme ça, ne jugez donc pas cet écrit !), les dames se sont tournées vers mon objectif. Ce moment nous rappelle les IIFAs Awards, en 2016. Avec notre accès sur le green carpet, nous avions passé plus de 6 heures debout à prendre en photo tout le gratin de Bollywood. Asmae étant la seule à connaître les noms de tout le monde, même l’équipe présente lui a réclamé des confirmations. Finalement, la star de la soirée, c’était elle. Les prochaines fois n’ont pas été aussi chouettes : on a attendu debout pendant trois heures, le soleil tapait fort sur nos têtes et on n’a pas vu grand-monde en dehors de nombreuses nanas dont la célébrité nous dépasse. Pour les égéries L’Oréal, ça va donc être compliqué.

Les égéries L'Oréal, le (presque) parcours du combattant bien ficelé.

Avant de se laisser emporter par la frénésie du Festival et de jouer les paparazzi devant les hôtels, on a fait les choses bien. Contacter L'Oréal. Surprise énorme quand on reçoit une réponse qui annonce que, malheureusement, les plannings sont tous bloqués des mois à l’avance. Pas forcément étonnant, en fait, surtout quand on sait que ce sont souvent des très grandes stars comme par exemple Aishwarya Rai Bachchan. Pas la peine de rêver, une interview ne sera pas possible. Mais la prendre en photo pour son tapis rouge ? Peut-être ! Sauf qu’après avoir poireauté deux jours d'affilée pour notre Queen Aish, on a saisi l’info : l’entrée principale du Martinez, ce n’est pas pour elle (ni pour les autres égéries).

Car souvent, les égéries veulent créer l’effet de surprise. Les tenues doivent être secrètes, et donc leur sortie de l’hôtel se veut forcément discrète. Ainsi, avec un peu de temps et de réflexion (et le souvenir de mes heures passées à stalker Aishwarya Rai Bachchan, Deepika Padukone et Sonam Kapoor), on se pose non loin de la terrasse L’Oréal et de la sortie côté jardin. Car une fois prêtes, ces mesdames enchaînent deux sessions photos : une en privé avec leur team, parfois au bord d’un balcon ou en improvisant un studio dans une chambre, et une autre sur la terrasse avec la fameuse enseigne L'Oréal. Et croyez-le ou non, il est facile d’attendre sous les arbres, avec une glace, de voir l’enseigne ainsi que les égéries qui posent devant. Une fois la belle photo prise, direction l'accueil mythique de l’hôtel pour de nouvelles photos et enfin, il ne reste plus qu’à monter dans sa voiture ou son van (selon la robe) pour attendre tranquillement son tour sur le tapis rouge. Avec Asmae, on a calculé. Parfois, elles passent presque une heure dans l’engin avant de sortir, alors que l’hôtel n’est qu’à 15 minutes de marche…

Et c’est là que les choses se compliquent. Parce qu’avoir un badge photographe ne me garantit pas un spot sur le red carpet - surtout si je ne suis pas là pour tous les invités ! Ensuite, tout le monde ne reste pas pour la séance du film. Alors il nous reste une seule option : l’entrée des artistes convertie en sortie, où les voitures attendent leurs clients et qui est uniquement accessible avec une accréditation. Alors installées derrière, avec le live du red carpet sur le téléphone, on observe le bon déroulement des choses. L’Oréal fait les choses proprement : les égéries défilent les unes après les autres au même moment (qui n’a pas vu les photos d’Andie MacDowell avec Anushka Sharma ?) puis après la montée des marches, elles repartent aussitôt en voiture. Parfois, il y a un peu de temps d’attente avant que le van arrive, et c’est là qu’on peut faire de nouvelles photos et même papoter avec elles. On a ainsi vécu un moment magique avec Aditi Rao Hydari que l’on n'est pas prêtes d’oublier !

La magie indiscutable des rues cannoises. Pendant deux semaines, Cannes est le centre du monde. Chaque journée révèle un nouveau secret du festival, mais apporte aussi son lot de rencontres et de retrouvailles. La liste est longue et on aurait pu prendre en photo à chaque moment, mais il y a aussi cette magie de l’anonymat. Croiser la route de Vijay Varma, par hasard, alors qu’il sort d’un restaurant, penser à Ali Fazal et Richa Chadda tout en courant prendre son bus pour réaliser qu’ils sont juste à côté de nous. Repérer Anurag Kashyap au cinéma, hurler en apercevant Manushi Chillar dans les rues juste après son tapis rouge alors que nous étions sur le point de partir, dire à Sucharita Tyagi qu’on adore son travail, se retrouver derrière Niharika NM avant la montée des marches pour Kennedy, s’incruster durant le photoshoot privé de Mrunal Thakur et j’en passe… Tant de petites choses complètement imprévues qui ont fait notre bonheur. Notre objectif était de montrer à ces personnalités qu’il y a des fans français du cinéma indien. Alors on espère avoir réussi, tant par mes photos, que par les interviews gérées avec finesse par Asmae - qui a véritablement un don pour charmer ceux en face d’elle - que ses critiques sincères et analytiques, ou encore simplement les petits mots envoyés par amour lors d’une brève rencontre.

Ajoutez à ça une nouvelle habitude pour nous : prendre des vidéos pour qu’Asmae vous offre un vlog exclusif sur notre quotidien. Aucune de nous n’était du genre à tout filmer, et on s’en est souvent rendue compte en fin de journée. Asmae a passé des matinées entières à tout préparer, à vérifier les sous-titres automatiques, à découper les séquences, à choisir la musique. Si vous ne la suivez pas sur Tiktok, foncez ! Clairement, on a toujours peur de filmer des choses pas intéressantes là où parfois, on vit des choses géniales et on n’y pense pas vraiment. Pour une première fois (un vlog par jour quand même), c’est tout de même incroyablement réussi et pour ça, il faut dire : Merci Asmae !

Jamais seule.

Tout ça, tout ce que nous avons vécu, c’est possible parce que le Festival nous a fait confiance, et parce que Bolly&Co existe grâce à vous. Notre passion pour le cinéma indien, vous la partagez avec nous depuis nos débuts en 2010 et on ne vous en remerciera jamais assez. C’est vous qui nous avez toujours motivé à faire plus, à faire mieux et quelle consécration incroyable ont représenté ces deux semaines ! Merci, vraiment.

Pour ceux qui se posent la question : non, personne ne nous a financées. Pas de sponsor. Bolly&Co est un magazine gratuit, fait par des fans bénévoles. Un média libre et accessible. On ne gagne pas d’argent avec Bolly&Co, par conséquent c’est avec notre argent de poche que nous avons payé notre logement, et tout le reste.

Mais quand on aime, on ne compte pas, n’est-ce pas ?

Et si vous voulez entendre notre bilan du festival, enregistré le samedi même où tout était fini, alors je vous donne rendez-vous le lundi 5 juin pour le nouvel épisode de Namaste Le Cinéma ! C’était l'occasion pour nous d’enregistrer un épisode spécial, de revenir sur ces deux semaines intenses mais joyeuses.
mots par
Elodie Hamidovic
« A grandi avec le cinéma indien, mais ses parents viennent des pays de l'est. Cherchez l'erreur. »
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