Critique : Heropanti (★★☆☆☆)
18 juillet 2023
— Cet article a été publié dans le numéro 8 de Bolly&Co, page 201.
Lorsque Sabbir Khan, réalisateur malheureux du bide colossal Kambakkht Ishq, annonce son nouveau projet Heropanti, on a toutes les raisons de s’en faire ! Sorti en mai 2014, ce masala romantique compte à sa distribution deux jeunes acteurs dont c’est le premier film à Bollywood : Tiger Shroff (fils du célèbre Jackie) et Kriti Sanon (qu’on a déjà vu dans le film télougou 1 - Nenokkadine). La bande-annonce donne le ton : nous voilà face à un film d’action sur fond de romance contrariée. On a ainsi droit au sempiternel imbroglio de l’amour impossible, du héros omnipotent qui tombe facilement la chemise à l’héroïne belle et pleurnicharde, sans oublier le père réfractaire et sa bande de malfrats. Et comme si cela ne suffisait pas, le pitch de Heropanti est directement pompé sur celui du succès de Tollywood Parugu, sorti en 2008 avec Allu Arjun et Sheela dans les rôles principaux.
Chowdhary (Prakash Raj) est sur le point de marier en grandes pompes sa fille aînée Renu (Sandeepa Dhar) quand celle-ci s’enfuit avec son petit-ami Rakesh (Devanshu Sharma). Fou de rage, il se lance à la poursuite du couple et fait prisonnier les amis du jeune homme, dont le valeureux Bablu (Tiger Shroff), déterminé à éloigner le père enragé des deux amoureux. Et parce qu’il faut une belle plante pour agrémenter l’histoire, Bablu craque au passage pour Dimpy (Kriti Sanon), la cadette de Chowdhary…
Heropanti s’inscrit dans la lignée de films tels que Ready, Boss et R... Rajkumar. C’est assez réjouissant de voir un jeune acteur camper le rôle titre masala d’action bourré de testostérones, plutôt qu’un quadragénaire de moins en moins crédible du type de Salman Khan ou d’Akshay Kumar, pourtant grands spécialistes du genre. Tiger Shroff a tout juste 24 ans et il s’agit-là de son premier rôle au cinéma. Ce qu’on remarque de Tiger en premier lieu, c’est sa plastique de rêve. En effet, le jeune homme s’est sculpté un corps d’Apollon en vue de ses débuts sur grand écran. Mais l’ironie dans l’histoire, c’est que c’est également tout ce que l’on retient en sortant du visionnage de Heropanti. A part ses muscles et ses talents indéniables en danse, Tiger n’offre pas grand chose de nouveau sur le plan du jeu. Il est inexpressif, affiche un jeu artificiel et désinvesti. De plus, malgré ses abdos et ses bagarres de haut vol, il manque probablement un semblant de maturité à ce garçon. Il est bel homme certes, mais un élément essentiel à la réussite d’un acteur lui fait cruellement défaut : le charisme.
Mais s’il veut durer, Tiger doit immédiatement se sortir de son physique de « fighter » et s’essayer à des rôles différents. Ainsi, il parviendra peut-être à surprendre l’audience à la manière d’Alia Bhatt. Cette dernière avait effectivement fait forte impression dans Highway en 2014 après ses débuts chaotiques dans Student Of The Year. Pourtant, le problème ne vient pas uniquement du comédien. Puisque le personnage de Bablu est tout bonnement caricatural. Ce n’est qu’un tas de muscles qui jette son dévolu sur une belle plante. Difficile donc de laisser un sentiment de fraîcheur et de renouveau à travers ce rôle cramoisi de mec surpuissant. Pour donner la réplique à Tiger, il y a Kriti Sanon. Tout comme bon nombre de ses consoeurs (Deepika Padukone, Bipasha Basu, Anushka Sharma...), la jeune femme est d’abord passée par la case mannequin avant de se lancer au cinéma.
Ici, elle n’a pas grand chose à faire, à part être belle et avoir la larme facile. Le personnage de Dimpy est aussi creux que celui de Bablu, au moins ont-ils l’avantage de faire la paire ! Néanmoins, Kriti laisse un plutôt bon souvenir. La jeune femme possède un vrai dynamisme dans son jeu dans toute la première partie du film, qu’elle perd hélas dès lors qu’on approche du dénouement, la faute à un rôle qui s’essouffle au fur et à mesure que l’histoire avance. Mais il est fort à parier que Kriti Sanon ira loin à Bollywood si elle écope à l’avenir de personnages plus vifs et inattendus.
Tiger et Kriti partagent une belle alchimie à l’écran, probablement due au fait qu’ils aient le même âge et que ce métrage soit le premier de leur carrière à Bollywood. Si leur romance est franchement bancale, elle ne s’effondre pas grâce à l’osmose qu’ils sont parvenus à créer entre leurs personnages. Prakash Raj est à l’aise dans la peau de ce patriarche ainsi meurtri qu’intransigeant. Il faut dire qu’il a déjà donné dans ce rôle pour la version originale du film en télougou, mais également pour des œuvres comme Bommarillu, Konchem Ishtam Konchem Kashtam et Solo. C’est également un plaisir de retrouver Sandeepa Dhar au cinéma depuis son premier film Isi Life Mein. Elle incarne avec verve la jeune Renu, tiraillée entre l’amour qu’elle porte à son père et celui qu’elle voue à son mari.
Sabbir Khan n’a dirigé qu’un seul film avant celui-ci : l’audacieux mais finalement foireux Kambakkht Ishq. Cette première réalisation a coûté très cher à ses producteurs et a représenté l’occasion de voir figurer des personnalités internationales telles que Denise Richards, Sylvester Stallone et Brandon Routh. Réunissant les énormes stars indiennes Akshay Kumar et Kareena Kapoor, les attentes autour de ce projet étaient telles que le résultat final fut catastrophique, malgré des scores au box-office plutôt décents. Kambakkht Ishq aurait pu détruire la carrière de Sabbir Khan, qui a été forcé d’annuler son projet suivant Heer and Ranjha, pour lequel Shahid Kapoor et Deepika Padukone étaient pressentis. Avec Heropanti, il revoit ses ambitions à la baisse et ne vend rien d’autre qu’un masala populaire. Contrairement à Kambakkht Ishq, on ne nous promet rien de grandiloquent, mais un divertissement familial qui respecte les codes du genre sans réellement les faire évoluer.
Déjà, il mise sur deux débutants au lieu de mettre en porte-à-faux deux stars reconnues. Pour assurer ses arrières, il exploite d’ailleurs un scénario qui a fait ses preuves dans le sud de l’Inde, ayant d’ailleurs valu à Allu Arjun le South Filmfare Award du Meilleur Acteur. Le cinéaste ne prend donc pas trop de risques avec ce métrage censé lui permettre de regagner la confiance du public. Pourtant, il rate le coche justement à cause de son manque d’audace. Si le film a plutôt bien fonctionné en salles, il n’en demeure pas moins qu’il a laissé de marbre les critiques, déçus de ne voir en Heropanti qu’une version low-cost des films de masse de Salman Khan. Heropanti se contente de suivre la recette bien connue des métrages d’action commerciaux, sans chercher à en innover certains des ingrédients.
Mais Heropanti a aussi ses qualités, et sa musique en fait partie. Clairement l’un des chartbusters de l’année, l’album du film est une vraie mine à tubes. Composée par le duo Sajid-Wajid avec la participation de Manj Musik, la bande-son de l'œuvre marque les esprits par son savant mélange de morceaux énergiques et de balades romantiques. Le titre « Whistle Baja » est extrêmement efficace, ponctué par les pas de danse précis du rejeton débutant. Ce son rend par ailleurs hommage au film Hero dans lequel le papa de Tiger, Jackie Shroff, faisait ses débuts en 1983. Le crooner indien Mohit Chauhan pose sa voix sur deux morceaux : la tendre « Rabba » et la mélancolique « Tabah ». Le titre électro « Raat Baar » ne manque pas de romantisme grâce au timbre caractéristique d’Arijit Singh. Mustafa Zahid nous gratifie de l’émouvante « Tere Binaa », qu’il a également co-écrit et composé avec Bilal Saeed. Enfin, le film se clôture sur l’entêtante et dynamique « Pappi Song ».
Au rayon des nouveautés de 2014, Heropanti fait partie des produits de base à la fabrication classique, sans grande nouveauté ni originalité. Pourtant, il n’est pas non plus à classer dans la catégorie des nanars car malgré ses défauts, il reste de bonne facture. Alors effectivement, Tiger Shroff a des progrès à faire et devrait prendre quelques cours de comédie en vue de son prochain film. La trame n’a rien de différent, de même pour la photographie et l’écriture des personnages. Mais au final, le résultat est loin d’être indigeste et malgré d’incontestables fautes de goût, Heropanti se regarde d’une traite sans que l’on ne s’ennuie un seul instant.
Le montage est rythmé et ne laisse aucun moment de latence dans la narration, maintenant le spectateur attentif aux aventures de Bablu et Dimpy et ce bien qu’elles soient des plus prévisibles. Ainsi, ce dernier cru de Sabbir Khan constitue le parfait film du dimanche soir, un masala ni vraiment réussi ni totalement raté, qui se visionne sans déplaisir mais qui ne vous laissera probablement pas un souvenir indélébile.
Lorsque Sabbir Khan, réalisateur malheureux du bide colossal Kambakkht Ishq, annonce son nouveau projet Heropanti, on a toutes les raisons de s’en faire ! Sorti en mai 2014, ce masala romantique compte à sa distribution deux jeunes acteurs dont c’est le premier film à Bollywood : Tiger Shroff (fils du célèbre Jackie) et Kriti Sanon (qu’on a déjà vu dans le film télougou 1 - Nenokkadine). La bande-annonce donne le ton : nous voilà face à un film d’action sur fond de romance contrariée. On a ainsi droit au sempiternel imbroglio de l’amour impossible, du héros omnipotent qui tombe facilement la chemise à l’héroïne belle et pleurnicharde, sans oublier le père réfractaire et sa bande de malfrats. Et comme si cela ne suffisait pas, le pitch de Heropanti est directement pompé sur celui du succès de Tollywood Parugu, sorti en 2008 avec Allu Arjun et Sheela dans les rôles principaux.
Mais alors, que peut-on réellement attendre de ce film ? Heropanti vaut-il le coup ?
Chowdhary (Prakash Raj) est sur le point de marier en grandes pompes sa fille aînée Renu (Sandeepa Dhar) quand celle-ci s’enfuit avec son petit-ami Rakesh (Devanshu Sharma). Fou de rage, il se lance à la poursuite du couple et fait prisonnier les amis du jeune homme, dont le valeureux Bablu (Tiger Shroff), déterminé à éloigner le père enragé des deux amoureux. Et parce qu’il faut une belle plante pour agrémenter l’histoire, Bablu craque au passage pour Dimpy (Kriti Sanon), la cadette de Chowdhary…
Heropanti s’inscrit dans la lignée de films tels que Ready, Boss et R... Rajkumar. C’est assez réjouissant de voir un jeune acteur camper le rôle titre masala d’action bourré de testostérones, plutôt qu’un quadragénaire de moins en moins crédible du type de Salman Khan ou d’Akshay Kumar, pourtant grands spécialistes du genre. Tiger Shroff a tout juste 24 ans et il s’agit-là de son premier rôle au cinéma. Ce qu’on remarque de Tiger en premier lieu, c’est sa plastique de rêve. En effet, le jeune homme s’est sculpté un corps d’Apollon en vue de ses débuts sur grand écran. Mais l’ironie dans l’histoire, c’est que c’est également tout ce que l’on retient en sortant du visionnage de Heropanti. A part ses muscles et ses talents indéniables en danse, Tiger n’offre pas grand chose de nouveau sur le plan du jeu. Il est inexpressif, affiche un jeu artificiel et désinvesti. De plus, malgré ses abdos et ses bagarres de haut vol, il manque probablement un semblant de maturité à ce garçon. Il est bel homme certes, mais un élément essentiel à la réussite d’un acteur lui fait cruellement défaut : le charisme.
Cependant, il faut souligner l’aisance du fils Shroff dans les séquences de danse et de combat, qui les a réalisées lui-même.
Mais s’il veut durer, Tiger doit immédiatement se sortir de son physique de « fighter » et s’essayer à des rôles différents. Ainsi, il parviendra peut-être à surprendre l’audience à la manière d’Alia Bhatt. Cette dernière avait effectivement fait forte impression dans Highway en 2014 après ses débuts chaotiques dans Student Of The Year. Pourtant, le problème ne vient pas uniquement du comédien. Puisque le personnage de Bablu est tout bonnement caricatural. Ce n’est qu’un tas de muscles qui jette son dévolu sur une belle plante. Difficile donc de laisser un sentiment de fraîcheur et de renouveau à travers ce rôle cramoisi de mec surpuissant. Pour donner la réplique à Tiger, il y a Kriti Sanon. Tout comme bon nombre de ses consoeurs (Deepika Padukone, Bipasha Basu, Anushka Sharma...), la jeune femme est d’abord passée par la case mannequin avant de se lancer au cinéma.
Ici, elle n’a pas grand chose à faire, à part être belle et avoir la larme facile. Le personnage de Dimpy est aussi creux que celui de Bablu, au moins ont-ils l’avantage de faire la paire ! Néanmoins, Kriti laisse un plutôt bon souvenir. La jeune femme possède un vrai dynamisme dans son jeu dans toute la première partie du film, qu’elle perd hélas dès lors qu’on approche du dénouement, la faute à un rôle qui s’essouffle au fur et à mesure que l’histoire avance. Mais il est fort à parier que Kriti Sanon ira loin à Bollywood si elle écope à l’avenir de personnages plus vifs et inattendus.
Ce qu’on ne peut pas reprocher à Heropanti, c’est la complicité qui lie son couple vedette.
Tiger et Kriti partagent une belle alchimie à l’écran, probablement due au fait qu’ils aient le même âge et que ce métrage soit le premier de leur carrière à Bollywood. Si leur romance est franchement bancale, elle ne s’effondre pas grâce à l’osmose qu’ils sont parvenus à créer entre leurs personnages. Prakash Raj est à l’aise dans la peau de ce patriarche ainsi meurtri qu’intransigeant. Il faut dire qu’il a déjà donné dans ce rôle pour la version originale du film en télougou, mais également pour des œuvres comme Bommarillu, Konchem Ishtam Konchem Kashtam et Solo. C’est également un plaisir de retrouver Sandeepa Dhar au cinéma depuis son premier film Isi Life Mein. Elle incarne avec verve la jeune Renu, tiraillée entre l’amour qu’elle porte à son père et celui qu’elle voue à son mari.
Sabbir Khan n’a dirigé qu’un seul film avant celui-ci : l’audacieux mais finalement foireux Kambakkht Ishq. Cette première réalisation a coûté très cher à ses producteurs et a représenté l’occasion de voir figurer des personnalités internationales telles que Denise Richards, Sylvester Stallone et Brandon Routh. Réunissant les énormes stars indiennes Akshay Kumar et Kareena Kapoor, les attentes autour de ce projet étaient telles que le résultat final fut catastrophique, malgré des scores au box-office plutôt décents. Kambakkht Ishq aurait pu détruire la carrière de Sabbir Khan, qui a été forcé d’annuler son projet suivant Heer and Ranjha, pour lequel Shahid Kapoor et Deepika Padukone étaient pressentis. Avec Heropanti, il revoit ses ambitions à la baisse et ne vend rien d’autre qu’un masala populaire. Contrairement à Kambakkht Ishq, on ne nous promet rien de grandiloquent, mais un divertissement familial qui respecte les codes du genre sans réellement les faire évoluer.
C’est en cela que Heropanti est un film moins prétentieux que son prédécesseur.
Déjà, il mise sur deux débutants au lieu de mettre en porte-à-faux deux stars reconnues. Pour assurer ses arrières, il exploite d’ailleurs un scénario qui a fait ses preuves dans le sud de l’Inde, ayant d’ailleurs valu à Allu Arjun le South Filmfare Award du Meilleur Acteur. Le cinéaste ne prend donc pas trop de risques avec ce métrage censé lui permettre de regagner la confiance du public. Pourtant, il rate le coche justement à cause de son manque d’audace. Si le film a plutôt bien fonctionné en salles, il n’en demeure pas moins qu’il a laissé de marbre les critiques, déçus de ne voir en Heropanti qu’une version low-cost des films de masse de Salman Khan. Heropanti se contente de suivre la recette bien connue des métrages d’action commerciaux, sans chercher à en innover certains des ingrédients.
Mais Heropanti a aussi ses qualités, et sa musique en fait partie. Clairement l’un des chartbusters de l’année, l’album du film est une vraie mine à tubes. Composée par le duo Sajid-Wajid avec la participation de Manj Musik, la bande-son de l'œuvre marque les esprits par son savant mélange de morceaux énergiques et de balades romantiques. Le titre « Whistle Baja » est extrêmement efficace, ponctué par les pas de danse précis du rejeton débutant. Ce son rend par ailleurs hommage au film Hero dans lequel le papa de Tiger, Jackie Shroff, faisait ses débuts en 1983. Le crooner indien Mohit Chauhan pose sa voix sur deux morceaux : la tendre « Rabba » et la mélancolique « Tabah ». Le titre électro « Raat Baar » ne manque pas de romantisme grâce au timbre caractéristique d’Arijit Singh. Mustafa Zahid nous gratifie de l’émouvante « Tere Binaa », qu’il a également co-écrit et composé avec Bilal Saeed. Enfin, le film se clôture sur l’entêtante et dynamique « Pappi Song ».
En conclusion
Au rayon des nouveautés de 2014, Heropanti fait partie des produits de base à la fabrication classique, sans grande nouveauté ni originalité. Pourtant, il n’est pas non plus à classer dans la catégorie des nanars car malgré ses défauts, il reste de bonne facture. Alors effectivement, Tiger Shroff a des progrès à faire et devrait prendre quelques cours de comédie en vue de son prochain film. La trame n’a rien de différent, de même pour la photographie et l’écriture des personnages. Mais au final, le résultat est loin d’être indigeste et malgré d’incontestables fautes de goût, Heropanti se regarde d’une traite sans que l’on ne s’ennuie un seul instant.
Le montage est rythmé et ne laisse aucun moment de latence dans la narration, maintenant le spectateur attentif aux aventures de Bablu et Dimpy et ce bien qu’elles soient des plus prévisibles. Ainsi, ce dernier cru de Sabbir Khan constitue le parfait film du dimanche soir, un masala ni vraiment réussi ni totalement raté, qui se visionne sans déplaisir mais qui ne vous laissera probablement pas un souvenir indélébile.
LA NOTE: 1,5/5