Jigra : que vaut réellement le thriller de cet automne ?
14 octobre 2024
Depuis vendredi, Jigra, dernier né de Vasan Bala, est sorti dans plusieurs salles obscures de l’Hexagone grâce au distributeur Friday Entertainment. Pour rappel, le cinéaste nous a livré deux des films les plus saisissants de ces dernières années : Mard Ko Dard Nahi Hota en 2019 et Monica O My Darling en 2022. Son premier essai derrière la caméra, Peddlers, sera également sélectionné pour la Semaine de la Critique au Festival de Cannes de 2012, mais ne sortira malheureusement jamais en Inde. Il nous était donc impossible de passer à côté de son nouveau métrage, qui plus est avec nul autre que la jeune Alia Bhatt à sa tête.
Lorsque son petit frère Ankur (Vedang Raina) est injustement condamné à mort dans une prison chinoise, Satya (Alia Bhatt) entame une course contre la montre pour le secourir, et ce par tous les moyens…
Véritable cinéphile, Bala injecte son style personnel dans sa mise en scène, évoquant allègrement les masala d’Amitabh Bachchan, avec la volonté claire de faire d'Alia Bhatt une incarnation de la ‘angry young woman’, héritière féminine du trope longuement incarné par Big B dans les années 1970 et 1980. Dès les premières minutes, Jigra bénéficie largement de son solide casting. Vedang Raina livre effectivement une performance très convaincante, capturant à la fois la sensibilité et la tension nécessaire au rôle d'Ankur. Alia Bhatt, en pleine maîtrise de son art, déploie son talent avec force, mais le film peine à donner assez de profondeur à son personnage pour que l’on puisse véritablement s’attacher à elle.
Je n’ai au demeurant pas pu m’empêcher de penser qu’une actrice plus mature et à la physicalité plus criante aurait peut-être été un choix plus pertinent pour le rôle… Rahul Ravindran, dans son premier film en langue hindi, s’en sort impeccablement, faisant preuve d’une grande justesse dans son interprétation d’ancien flic à l’inébranlable intégrité. De son côté, Manoj Pahwa est, comme souvent, dans son élément et apporte une gravité nécessaire au récit, le tout non sans panache. Mais c’est Vivek Gomber, en gardien de prison sadique, qui impressionne véritablement, sa prestation hantant l’écran par sa cruauté silencieuse. Le nom de son personnage est justement une référence à peine voilée au Hans Landa de Inglourious Basterds.
Il y a une claire maîtrise du rythme, une exploitation savante de la lumière et des couleurs qui donnent au film une esthétique particulière. Le métrage prend des allures de mashup entre un Prison Break nerveux et un film d’action hongkongais, jouant frontalement avec les codes des drames carcéraux. En effet, le réalisateur reprend des tropes bien connus de ce genre : les amitiés nouées dans la douleur, les gardiens cruels, le prisonnier injustement condamné et la quête de rédemption du bad boy. Si Bala ne réinvente rien sur le plan narratif, il s'amuse avec ces poncifs pour les revisiter, parfois avec sagacité, mais sans vraiment dépasser le cadre attendu.
Le film est tellement focalisé sur son style visuel et son ambiance qu'il en oublie d'en enrichir la consistance narrative. L'intrigue manque souvent de profondeur et semble se noyer dans un excès de formalisme. Les idées visuelles sont belles et audacieuses, mais elles ne viennent pas compenser un scénario souvent trop mince. L'énergie consacrée à l'esthétique aurait gagné à être réinvestie dans la construction d'un récit plus solide et étonnant.
Enfin, la musique - que l’on doit à Achint Thakkar et Manpreet Singh, contribue grandement à l’atmosphère du film en y insufflant beaucoup de sensibilité. Le morceau-titre, interprété par Vedang Raina lui-même, résonne avec force et s’inscrit comme l’un des atouts notables de l'œuvre.
Jigra est un thriller visuellement impressionnant et s’appuyant sur des performances solides. Cependant, le film souffre quand même d’un certain manque de profondeur narrative. Vasan Bala livre un exercice de style certes maîtrisé, mais qui aurait mérité une écriture plus rigoureuse pour donner à l'histoire toute sa portée émotionnelle.
Alors, que vaut réellement Jigra ? Et surtout, est-il à la hauteur de ses prestigieux prédécesseurs ?
Lorsque son petit frère Ankur (Vedang Raina) est injustement condamné à mort dans une prison chinoise, Satya (Alia Bhatt) entame une course contre la montre pour le secourir, et ce par tous les moyens…
Le film de Vasan Bala marque une nouvelle incursion du réalisateur dans le thriller d'action, cette fois-ci avec une héroïne à la fois forte et tourmentée, incarnée ici par la superstar Alia Bhatt.
Véritable cinéphile, Bala injecte son style personnel dans sa mise en scène, évoquant allègrement les masala d’Amitabh Bachchan, avec la volonté claire de faire d'Alia Bhatt une incarnation de la ‘angry young woman’, héritière féminine du trope longuement incarné par Big B dans les années 1970 et 1980. Dès les premières minutes, Jigra bénéficie largement de son solide casting. Vedang Raina livre effectivement une performance très convaincante, capturant à la fois la sensibilité et la tension nécessaire au rôle d'Ankur. Alia Bhatt, en pleine maîtrise de son art, déploie son talent avec force, mais le film peine à donner assez de profondeur à son personnage pour que l’on puisse véritablement s’attacher à elle.
C’est d'ailleurs l’un des regrets majeurs de ce film : malgré son talent, Alia Bhatt se retrouve prisonnière d’un rôle qui manque de densité émotionnelle, l'écriture ne lui permettant jamais réellement d'aller au-delà de la colère et de la révolte.
Je n’ai au demeurant pas pu m’empêcher de penser qu’une actrice plus mature et à la physicalité plus criante aurait peut-être été un choix plus pertinent pour le rôle… Rahul Ravindran, dans son premier film en langue hindi, s’en sort impeccablement, faisant preuve d’une grande justesse dans son interprétation d’ancien flic à l’inébranlable intégrité. De son côté, Manoj Pahwa est, comme souvent, dans son élément et apporte une gravité nécessaire au récit, le tout non sans panache. Mais c’est Vivek Gomber, en gardien de prison sadique, qui impressionne véritablement, sa prestation hantant l’écran par sa cruauté silencieuse. Le nom de son personnage est justement une référence à peine voilée au Hans Landa de Inglourious Basterds.
La mise en scène de Vasan Bala est clairement marquée par son amour pour le cinéma, plus particulièrement pour le cinéma indien populaire.
Il y a une claire maîtrise du rythme, une exploitation savante de la lumière et des couleurs qui donnent au film une esthétique particulière. Le métrage prend des allures de mashup entre un Prison Break nerveux et un film d’action hongkongais, jouant frontalement avec les codes des drames carcéraux. En effet, le réalisateur reprend des tropes bien connus de ce genre : les amitiés nouées dans la douleur, les gardiens cruels, le prisonnier injustement condamné et la quête de rédemption du bad boy. Si Bala ne réinvente rien sur le plan narratif, il s'amuse avec ces poncifs pour les revisiter, parfois avec sagacité, mais sans vraiment dépasser le cadre attendu.
Toutefois, le point faible majeur de Jigra réside dans son écriture.
Le film est tellement focalisé sur son style visuel et son ambiance qu'il en oublie d'en enrichir la consistance narrative. L'intrigue manque souvent de profondeur et semble se noyer dans un excès de formalisme. Les idées visuelles sont belles et audacieuses, mais elles ne viennent pas compenser un scénario souvent trop mince. L'énergie consacrée à l'esthétique aurait gagné à être réinvestie dans la construction d'un récit plus solide et étonnant.
Enfin, la musique - que l’on doit à Achint Thakkar et Manpreet Singh, contribue grandement à l’atmosphère du film en y insufflant beaucoup de sensibilité. Le morceau-titre, interprété par Vedang Raina lui-même, résonne avec force et s’inscrit comme l’un des atouts notables de l'œuvre.
En conclusion
Jigra est un thriller visuellement impressionnant et s’appuyant sur des performances solides. Cependant, le film souffre quand même d’un certain manque de profondeur narrative. Vasan Bala livre un exercice de style certes maîtrisé, mais qui aurait mérité une écriture plus rigoureuse pour donner à l'histoire toute sa portée émotionnelle.
LA NOTE: 3/5