Bolly&co Magazine

Amaran, la pépite qui va vous réconcilier avec le film de guerre...

3 novembre 2024
Critique du film tamoul amaran avec Sivakarthikeyan et sai pallavi
Grâce à Night ED Films, j’ai eu le plaisir et le privilège de découvrir Amaran, nouveau film de Rajkumar Periasamy qui enfile de nouveau sa casquette de cinéaste, 7 ans après son premier film Rangoon (avec Gautham Karthik et Sana Makbul, à ne pas confondre avec le métrage hndi du même nom réalisé par Vishal Bhardwaj). Avec Amaran, le metteur en scène se frotte à l’exercice du biopic de guerre, sous-genre ô combien essoré au cinéma indien. Parmi les multiples propositions existantes, Shershaah (2021) et Major (2022) se sont particulièrement imposés au box-office. Toutefois, je n’avais personnellement pas adhéré à ces métrages et appréhendais donc beaucoup de visionner Amaran.

Je ne me suis cependant pas interdite de foncer pour une raison évidente : mon amour sans limite pour l’actrice Sai Pallavi, qui y tient l’un des rôles principaux. La comédienne a toujours eu le don de me cueillir, même dans des films à la qualité très relative. Face à elle, la star tamoule Sivakarthikeyan prête ses traits à Mukund Varadaraja, soldat de l’armée indienne tombé au combat en 2014. J’ai personnellement une profonde aversion pour cet acteur, qui avait néanmoins réussi à me clouer le bec l’an dernier dans le formidable Maaveeran (2023).

Alors, qu’en est-il réellement ? Amaran s’inscrit-il dans la lignée de ses vides prédécesseurs en hagiographie au sous-texte clivant ?



Comment vous dire que je n’étais pas prête pour ce qui m'attendait ? En effet, Amaran s’apparente davantage à un Neerja (2016) dans son style narratif et dans son approche des personnages. Dès son premier plan-séquence, Amaran pose un cadre inédit dans le cinéma de guerre indien, en célébrant la laïcité et l’unité nationale, deux thèmes cruciaux et pourtant souvent ignorés. Ce choix thématique place immédiatement le film en dehors des productions habituelles, rappelant au spectateur que l'armée indienne est un microcosme de toutes les communautés du pays, soudées par le même devoir.

L’autre surprise de Amaran vient de son acteur vedette. Effectivement, après sa prestation impeccable dans Maaveeran qui laissait enfin entrevoir son potentiel, Sivakarthikeyan poursuit sur sa lancée avec Amaran, livrant une interprétation saisissante et nuancée, le tout dans un registre différent.

A ses côtés, la révélation Bhuvan Arora fait des débuts solides dans le cinéma tamoul, et ce après avoir marqué les esprits plus tôt dans la série Farzi ou encore dans Chandu Champion. Sa performance dans un rôle exigeant témoigne de sa polyvalence et ajoute une énergie vive et complémentaire à celle de son partenaire. Leur complicité y est d’ailleurs plus vraie que nature.

Mais l'âme de Amaran, c'est sans conteste Sai Pallavi, dont la douceur et le charisme solaire illuminent chaque scène.

L’alchimie qu’elle partage avec Sivakarthikeyan est indéniable et rend leurs interactions profondément touchantes, ancrant le métrage dans une humanité sincère qui transcende les scènes de guerre. C’est cette même sensibilité qui permet au film de briller là où d’autres - comme Shershaah, ont échoué en héroïsant leur protagoniste sans recul. Ici, Mukund est montré dans toute sa complexité : un soldat courageux, certes, mais aussi un fils têtu et un amoureux vulnérable. Ce réalisme confère une profondeur au personnage et offre au spectateur un portrait nuancé et accessible. Ainsi, on ne peut qu’entrer en empathie avec lui et être bouleversé par son inextricable destin.

De son côté, Rahul Bose apporte aussi une prestation solide dans un rôle secondaire et se double lui-même en tamoul, effort assez rare pour être souligné. En antagoniste, le charismatique Rohman Shawl - connu pour sa carrière de mannequin mais aussi pour avoir partagé la vie de Sushmita Sen, impressionne par son intensité froide. Son personnage, glaçant, complète le tableau sans jamais voler la vedette aux protagonistes, une tâche ô combien difficile qu’il accomplit avec une remarquable subtilité.

La mise en scène de Rajkumar Periasamy est maîtrisée et rythmée, construite avec le montage dynamique de R. Kalaivanan qui permet une immersion totale dans l’action, le tout en maintenant un équilibre entre scènes d’action intenses et moments plus intimes.

Plusieurs plans-séquences insufflent une tension palpable et permettent de ressentir l’intensité des missions de Mukund au Cachemire. Justement, ce prisme narratif sur la situation au Cachemire, bien que parfois un peu simpliste dans son fond, prend soin d'offrir une perspective plus sophistiquée dans la forme, témoignant d’un vrai effort d'authenticité et d'engagement de la part des créateurs du film, loin de toute démarche ostracisante. Enfin, la musique de G.V. Prakash Kumar s’inspire de la nostalgie des tubes tamouls des années 2010, touche qui renforce le côté émotionnel de l'intrigue sans alourdir les scènes. Je vous recommande évidemment tout l’album, plus particulièrement la magnifique “Hey Minnale”. Cet aspect old-school, allié à la modernité de la réalisation, crée une ambiance unique qui accompagne le spectateur dans les différentes étapes du récit, des séquences en tension aux moments de tendresse.

En conclusion



Amaran est bien plus qu’un film de guerre. Il raconte l’histoire d’un homme et célèbre son histoire sans l’idéaliser. Il rappelle que derrière chaque uniforme se cache un être humain avec des espoirs et des faiblesses. Il renvoie aussi à la cruelle destinée de ceux qui restent. Des parents, des enfants et des épouses de ces héros de guerre qui doivent aborder une vie après la perte de l’être aimé. Cette authenticité, servie par un casting et une réalisation d’exception, fait de Amaran une œuvre à ne pas manquer.
LA NOTE: 4/5

mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?