Bolly&co Magazine

Critique de Village Rockstars 2 : chronique d'une jeunesse dépossédée, entre rêves brisés et réalités sociales...

28 avril 2025
critique Village Rockstars 2 Festival des cinémas indiens de Toulouse
Huit ans après Village Rockstars, Rima Das retrouve son héroïne inoubliable, Dhunu - incarnée par la lumineuse Bhanita Das, qui avait remporté à juste titre le National Award du Meilleur Acteur Enfant pour le premier volet. Désormais adolescente, Bhanita Das impressionne à nouveau par la justesse et la sensibilité de son interprétation, dans ce rôle qui semble avoir été taillé sur mesure pour elle.

Village Rockstars 2 prend son temps pour s'installer : les quarante premières minutes, contemplatives, laissent présager un récit qui hésite à s'élancer.

Mais une fois les enjeux posés - la perte déchirante du père de Dhunu, emporté par des inondations aussi tragiques que réalistes, le métrage gagne en ampleur émotionnelle et nous saisit pour ne plus nous lâcher. Si dans le premier film, Dhunu poursuivait son rêve de musique avec la légèreté de l'enfance, cette suite directe nous invite à découvrir une héroïne confrontée aux dures réalités de l'âge adulte. Les responsabilités, lourdes et impitoyables, viennent peu à peu reléguer ses aspirations artistiques au second plan.

Lorsque le sort s'acharne, Village Rockstars 2 adopte un ton plus sombre, flirtant parfois avec le désespoir, mais sans jamais sombrer dans le misérabilisme. Rima Das parvient, avec une subtilité remarquable, à préserver l'optimisme viscéral de son personnage. Il affleure dans chaque regard de Dhunu, dans chaque accalmie entre deux averses tempétueuses, une promesse silencieuse que, malgré les épreuves, après la pluie viendra toujours le beau temps.

La mise en scène naturaliste de Rima Das respire à chaque plan.

Elle magnifie les paysages de l'Assam avec une poésie discrète, faisant dialoguer ciel, terre et éléments naturels pour mieux faire résonner les émotions de son héroïne. Dhunu et sa région semblent ne faire qu'un : deux visages d'une même identité, soudés par l'adversité. Cette profondeur du lien entre personnage et territoire renforce la puissance de l’œuvre, tout en éclairant le spectateur sur une réalité sociale douloureuse : celle des agriculteurs dont les conditions de vie deviennent de plus en plus précaires, thématique malheureusement récurrente dans cette édition du Festival des Cinémas Indiens de Toulouse.

Bhanita Das, toujours aussi magnétique, emporte l'adhésion par la seule force de son regard. Entre la candeur fragile du début et la détermination farouche de la fin, elle compose une palette d’émotions d'une finesse rare. Son jeu, tout en retenue, porte le métrage avec une authenticité bouleversante.

S'il n'est pas indispensable d'avoir vu le premier Village Rockstars pour apprécier cette suite, connaître le parcours de Dhunu aide assurément à saisir les nouveaux défis qui s'imposent à elle. Car au fil du récit, ses rêves changent, évoluent, se heurtant sans cesse à la réalité brutale d'un quotidien fait de deuils, de responsabilités précoces et de luttes silencieuses.

Engagée sans jamais être démonstrative, Rima Das signe avec Village Rockstars 2 une œuvre à la fois intime et politique, portée par une portée universelle que le public toulousain n'a pas manqué de saluer : le film a remporté le prix du jury (ex-aequo avec le Storyteller de Ananth Mahadevan) ainsi qu'une mention spéciale du jury étudiant, dans la dernière ligne droite de festival.

Une reconnaissance méritée pour ce film d'une humanité désarmante, qui fait de Rima Das l'une des voix les plus singulières et sincères du cinéma indien contemporain.
LA NOTE: 4,5/5

mots par
Asmae Benmansour-Ammour
« Quand Nivin Pauly a dit mon prénom, je ne m'en souvenais même plus moi-même. »
lui écrire un petit mot ?