Critique de Quelqu'un comme toi, la romance qui se veut "pas comme les autres"...
19 juillet 2025

Aap Jaisa Koi, ou Quelqu’un comme toi, est-il votre prochain coup de cœur ?
C’est l’histoire d’un professeur maladroit, cousin éloigné d’Andy Stitzer du film 40 ans toujours puceau, qui apprend un jour que la nièce du voisin de sa belle-sœur est d’accord pour le rencontrer et même mieux, pour l’épouser. Mais Shrirenu ne comprends pas comment Madhu peut-être aussi sûre d’elle, quand tant de femmes l’ont rejeté par le passé…
Le pitch d’Aap Jaisa Koi a de quoi plaire, mais cache d’autres aspects qui sont malheureusement éparpillés dans le métrage de façon maladroite. L’idée est sans doute de surprendre l’audience, mais ce n'est pas toujours réussi. Cependant, pour préserver cette volonté de la part de la réalisation, cette critique est rédigée sans spoiler et certains éléments du récit seront donc sciemment mis de côté (ou demeureront vagues) pour ne rien vous divulgâcher.
La première impression que laisse Aap Jaisa Koi, c’est un retour à la romance d’autrefois, à la construction simple de deux personnalités plutôt opposées, entre qui tout va finalement parfaitement coller.
Madhu possède une douceur certaine qui permet à Shri de sortir de sa coquille, d’espérer quelque chose de sincère et de vrai. La dynamique entre les deux est la grande force du film, et rend l’attachement pour ces personnages facile. Et si toute la première partie ressemble à un jeu d’apprivoisement, la seconde décide de bousculer les faits établis pour explorer d’autres enjeux sous-jacents.
Car une relation, c’est parfois plus que le lien qui unit deux personnes. C’est aussi deux familles qui se rassemblent. A partir du moment où le métrage décide d’aborder ces sujets-là, il perd hélas de son attrait. D’abord, on réalise la construction un peu bancale des ressorts narratifs et leur résolution soudaine a un léger goût de bâclé. Si c’est l’histoire de Madhu et Sri qui nous intéresse, Aap Jaisa Koi se permet cependant de faire des pas de côté et de regarder ce qu'il se passe autour d’eux. Une idée intéressante, mais jamais pleinement assumée. A chaque fois que la caméra s'intéresse à autre chose qu'au duo principal, il y a comme une impression forcée. Pour réussir à tout dire, on essaye de tout faire rentrer dans la même scène. Le déséquilibre se ressent jusqu’à la toute fin, ce qui donne l’impression que tout n’est définitivement que surface. Résultat, il y a des scènes méticuleusement écrites, pleines d'humour et de tendresse, et d'autres qui ont tout d’un soap opéra très vite oubliable. Heureusement, les premières restent assez en tête pour pardonner le niveau moins bon du reste.
Le film regorge également de clichés scénaristiques déjà-vu, d’autant plus visibles dans les moments de faiblesse du récit, qui ne sont pas sans rappeler ceux de Rocky Aur Rani Kii Prem Kahaani.
Comme dans le film de Karan Johar, la famille de Madhu est éduquée, discrète, ouverte d’esprit (et bengali, ces personnes intelligentes, trop occidentales et qui ne mangent que du poisson, d’après le cinéma). A contrario, celle de Shri est traditionaliste, vieux jeu et surtout conservatrice. Après tout, il enseigne le sanskrit et elle, le français. Vous voyez la différence ? La relation de nos deux héros va bousculer les pensées, notamment les normes de la société, mais ce n’est jamais subtil. Il y a comme la sensation que l’histoire vient grossièrement pointer du doigt ce qu’il faut ou ne faut pas faire, mais ne laisse aucune vraie place pour que ses personnages évoluent. Il y a ceux qui ont raison et ceux qui ont tort, et certaines facilités d’écriture pourront sans doute vous surprendre, ou vous paraître tout simplement extrêmement idiotes.
Mais Aap Jaisa Koi fonctionne. Et sur ses 115 minutes, malgré ses défauts clairs, le film réussit son pari d’amener sur la table une comédie romantique contemporaine avec des personnages trop peu vus dans le cinéma hindi.
Car on laisse souvent la romance aux “jeunes”, alors qu’il est possible que cela arrive à tout âge. C’est donc le film idéal pour répondre à ces acteurs qui se considèrent trop “vieux” pour le genre. La preuve, R. Madhavan est absolument extraordinaire dans le rôle de Shrirenu. Le comédien de 55 ans explore un être timide, défaitiste et faussement satisfait de son quotidien tranquille. Il insuffle à ce personnage une vulnérabilité certaine, sous les traits d’un prof qui, parfois, a tout d’un ado qui n’a pas encore fait sa crise. Il est imparfait, bourré d’insécurités, mais surtout profondément gentil. En face, Fatima Sana Shaikh continue de construire sa carrière sur des rôles peu conventionnels, et profondément humains. Elle fait un sans faute avec un personnage qui aurait pu être facilement une copie de la Rani de Rocky Aur Rani Kii Prem Kahaani (oui, encore ce film), mais elle possède en réalité sa propre personnalité. Madhu sait ce qu'elle veut, mais n’impose jamais son point de vue aux autres. L’interprétation de Fatima est bourrée de candeur et d’élégance. Elle garde surtout une part de mystère qui fait tout son charme, là où Shrirenu est incapable de cacher ce qu’il est. Elle est toute en retenue, il dégouline d’émotion. Ils sont chacun fragiles à leur manière. Entre les deux, ça marche vraiment bien, ce qui rend l’ensemble du film acceptable même quand tout va trop vite.
Parmi les points positifs du film, il y a aussi la caméra de Vivek Soni, loin de l’aspect trop conventionnel qu’offrait sa précédente œuvre : Une Sacrée Union (aussi disponible sur Netflix).
On aime notamment les gros plans qui encadrent les moments forts dans un Calcutta rêveur. Le directeur de la photo, Debojeet Ra, s’amuse des codes de la romance pour une esthétique plus authentique, honnête. Enfin, la bande-son de Rochak Kohli (sans lui, on aurait pas eu la sublime ballade “Jab Tu Sajan” avec Mohit Chauhan) et Justin Prabhakaran (le génie derrière l’album de Dear Comrade, entre autres) est également à prendre en compte, car elle accompagne le récit sans jamais déranger. Les instants de musiques sont de vrais moments de respiration dans la narration, accentuant autant les moments de joie que de peine. Une belle surprise.
En conclusion
Aap Jaisa Koi aurait pu être un sans faute, mais dérive trop souvent de son arc narratif principal, ce qui rend l’ensemble légèrement confus et déséquilibré. R. Madhavan et Fatima Sana Shaikh portent le métrage avec leur indéniable alchimie, et permettent un visionnage agréable. S’il y a déception, elle reste finalement plutôt minime.
LA NOTE: 3/5