Rencontre avec Janhvi Kapoor : élégance, émotion et engagement sur la Croisette...
21 mai 2025

Bolly&Co : Bonjour Janhvi ! Bienvenue à Cannes. Tout d'abord, je suppose que c'est votre première fois ici, en Côte d'Azur ?
Janhvi Kapoor : Je suis déjà venue ici, mais c’est ma première fois au festival.
B&C : C’est énorme, félicitations pour cette sélection de Homebound dans la section Un Certain Regard. J’aimerais avant tout savoir quelle a été votre première réaction en apprenant que votre film avait été sélectionné à Cannes ?
JK : Je crois que je ne l’ai toujours pas vraiment réalisé. Et chaque jour, je prends un peu plus conscience de l’ampleur de cet événement. Être placés, moi et notre film, sur une scène internationale comme celle-ci, ça veut dire énormément pour nous. Au-delà de l’excitation, de la gloire, de l’attention… Tout ça est bien sûr formidable ! Mais ce qui compte encore plus, c’est que ce genre de film, avec ce qu’il essaie de dire, soit mis en lumière sur une scène mondiale. C’est très fort pour nous.
Et c’est aussi la deuxième fois que le réalisateur (Neeraj Ghaywan, ndlr) vient ici. C’est quelqu’un qui a une éthique de travail incroyable, une grande honnêteté dans sa vie et dans son art. Je pense sincèrement qu’un homme comme lui mérite d’être récompensé à chaque étape de sa carrière. Il a mis tout son cœur et toute son âme dans ce film, c’est quelque chose de très personnel pour lui et je suis ravie que ce soit reconnu et célébré par autant de personnes.
B&C : Comme vous l’avez dit, le film a été particulièrement bien accueilli par le public de la salle Debussy. La projection a eu lieu ce matin et a reçu une standing ovation de 9 minutes. Tout le monde pleurait, moi y compris. J’aimerais savoir ce que vous avez ressenti en étant sur scène, dans un cadre aussi prestigieux, entourée d’autant d’amour de la part du public...
JK : C’était juste irréel. Je ne sais pas ce que j’ai fait pour mériter une telle chance, d’abord de faire partie d’un film comme celui-ci. Et le fait que Karan (Johar, ndlr) soutienne un projet comme celui-là, c’est déjà énorme - surtout pour une grande maison de production comme la sienne et plutôt connue pour son cinéma plus commercial.
B&C : C’est vrai...
JK : Cela montre que Karan tient vraiment à préserver une certaine intégrité artistique. Je me sens extrêmement privilégiée de connaître Neeraj d’aussi près. Il a été une bénédiction à bien des égards. Le fait qu’il ait pensé à moi pour ce rôle alors qu’un million d’actrices donneraient tout pour cette opportunité… Plus que tout, faire partie d’un film qui a un sens aussi personnel pour moi… Aucune sensation ne peut égaler ça.
Et je n’ai jamais ressenti quelque chose d’aussi fort auparavant. Ça vous donne l’impression que votre art a une portée plus grande que vous-même. Ce n’est pas seulement pour la vanité ou pour se satisfaire personnellement. Même si, à la base, on cherche souvent à s’exprimer ou à se découvrir en tant qu’artiste. Mais ici, c’est différent… C’est un bonheur collectif.

B&C : Il s’agit effectivement de contribuer à une belle histoire, à un travail d’équipe. Qu’est-ce qui vous a attirée vers ce personnage et comment êtes-vous entrée en connexion avec elle ?
JK : Ça a été un long processus. J’ai décidé très tôt que mon personnage, qui est assez politique, très clair dans ses idées et pragmatique dans sa manière de voir le monde, devait être compris en profondeur. Elle est passionnée, elle croit fortement en ses convictions et elle pousse les autres à voir les choses comme elle. Pour incarner ça, j’ai dû lire ce qu’elle lit, comprendre ses références, ses croyances politiques. Et puis, j’ai appris à l’aimer… J’ai aimé la façon dont elle négocie doucement avec Chandan pour qu’il devienne l’homme qu’elle le pense capable de devenir, en mesure de se libérer des chaînes de la société.
Elle a aussi son propre arc narratif. Elle est à la fois idéaliste et pragmatique. Ce n’est pas une figure féminine typique du cinéma. Elle sait ce qu’elle veut et elle n’a pas peur de le dire. J’ai beaucoup aimé ça.
B&C : J’ai adoré vous voir jouer une femme qui a quelque chose à dire et qui ne se laisse pas freiner par le jugement traditionnel.
JK : Oui, il y a beaucoup d’optimisme en elle, et c’est ce que j’ai aimé.
B&C : Parlons de vos partenaires à l’écran. Vous avez retrouvé Ishaan Khatter, avec qui vous avez débuté dans Dhadak, et vous avez aussi travaillé pour la première fois avec Vishal Jethwa. Comment s’est passée cette collaboration ?
JK : C’était une super expérience. Je m’entends très bien avec Vishal en dehors du tournage, j’aime beaucoup son humour. Et je pense que dans les relations humaines, il y a une sorte de rythme que chacun a, et j’ai l’impression que lui et moi avons trouvé une belle harmonie, ce qui a facilité notre jeu. Avec Ishaan, nous avons déjà une certaine familiarité grâce à notre tout premier film. Mais l’essentiel de mes scènes était avec Vishal et c’était vraiment un plaisir de travailler avec ces deux acteurs si talentueux.

B&C : Vous avez joué dans beaucoup de films commerciaux, mais aussi dans des projets très axés sur les personnages, comme Mili ou Ulajh, dans lesquels vous étiez formidable. Quelle place occupe Homebound dans votre filmographie et dans votre cœur d’artiste ? Qu’est-ce que ce film vous a apporté ?
JK : Ce film ne m’a pas seulement construite en tant que comédienne, mais aussi en tant que personne. Il a éveillé en moi une curiosité et un sentiment de responsabilité sociale. Il m’a poussée à réfléchir à notre société, à ses origines et à sa direction. Il m’a rendue plus sensible aux hiérarchies sociales, à ces lignes invisibles qui guident nos vies de manière inconsciente. Cette prise de conscience est inestimable. Je pense être devenue une personne plus responsable grâce à ce film. Et en tant qu’artiste, ça m’a aussi libérée. Travailler avec ce réalisateur, c’est comme se faire débloquer quelque chose en soi. On commence à se faire davantage confiance. Et j'en suis très reconnaissante.
B&C : Et y a-t-il eu des moments de tournage particulièrement marquants ?
JK : Chaque jour était une épreuve de vulnérabilité. Mais il y a une scène, avec Vishal sur la plage, où mon personnage vient lui rendre visite et lui demande pardon. C’était un échange profondément humain. Cette scène m’a marquée, elle était très honnête et très spéciale.
B&C : Magnifique, en effet. Et pour finir, qu’aimeriez-vous que le public retienne de Homebound ?
JK : J’espère que les gens seront touchés. Qu’ils seront poussés à réfléchir, à se demander s’ils sont complices ou victimes de systèmes qui déshumanisent certains, qui font croire que certaines personnes méritent plus de respect que d’autres. J’espère qu’on deviendra plus conscients de ces hiérarchies. Et plus encore, j’espère que le film laissera un message d’espoir, d’amitié, d’inclusion et d’une meilleure compréhension mutuelle, sans jugement.
B&C : Merci beaucoup Janhvi pour votre temps. Encore félicitations pour Homebound, c’est un film magnifique. J’espère qu’il aura un grand succès, en Inde comme dans le monde entier.
JK : Merci beaucoup.