Le 77ème Festival de Cannes de Bolly&Co
29 mai 2024
Après une première année dingue au Festival de Cannes en 2023, un super badge presse, des découvertes de folie et un soleil au rendez-vous sur la croisette, l’équipe de Bolly&Co était persuadée que pour la 77ème édition du Festival, c’était plié. Que le Festival allait nous accorder une nouvelle accréditation les yeux fermés, et qu’avec nos repères de l’année précédente, créer du contenu autour de l’Inde serait un véritable jeu d’enfant.
Nous l’avons beaucoup répété (que ce soit dans le podcast Namaste Le Cinéma ou dans notre article sur l’Inde à Cannes en 2024), mais cette année, le challenge était de taille : aucun badge presse, aucune accréditation. Mais c’est mal nous connaître que d’imaginer deux fans de cinéma indien annulant leur venue pour un simple morceau de papier.
Surtout quand l’Inde tient une place si importante au sein de cette édition du Festival, toutes sélections confondues. Logement réservé, billet de train payé (très cher, évidemment), congés posés (ou congé sans solde négocié, sinon ce n’est pas drôle), nouvel appareil photo dans le sac et paire de sneakers enfilée, l’équipe était prête à affronter le fameux Cannes OFF. Le Festival de Cannes sans badge magique, où il faut faire preuve de patience et de créativité pour voir des films et rencontrer du monde.
Et comme je (Elodie, ndlr.) suis plus à l’aise à l’écrit qu’à l’oral (si vous avez écouté notre épisode bilan enregistré le dernier jour à Cannes, vous savez très bien de quoi je parle), il est de mon devoir de compléter tout ce qui a été dit par ce petit écrit.
Pour un petit média comme le nôtre dont le focus est sur le cinéma indien, le Cannes OFF commence avant tout par une organisation de taille pour regarder les films présentés. La première découverte, c’est la billetterie du Festival pour le Grand Public, qui nous permet à 9h chaque jour de réserver les films en sélections parallèles (ACID, Cannes Cinéma, Quinzaine des Cinéastes et Semaine de la critique). Mais quand on sait que pour les pros, ça commence à 7h, autant vous dire qu’à 9h, il ne reste pas grand-chose.
La deuxième, c’est qu’il existe une accréditation avec la Quinzaine des Cinéastes. Formulaire de demande trouvé par hasard sur le site, nous recevons une réponse positive quelques heures plus tard. Avoir ce petit badge nous garantit une chose : la gratuité des films de la Quinzaine et la possibilité de réserver à 7h, comme les autres. Et ça tombe bien car il y a un film indien dans la sélection : Sister Midnight. C’est au moins ça de garanti !
Ensuite, les cinémas avec des accès pour les non-badgés. Nous en visons deux : la Licorne et Alexandre III (tous deux à 30 min à pied du logement, parce qu’on n’a plus la gratuité des transports garantie par le badge presse de l’année dernière). Fun fact : en deux semaines, grâce à la billetterie Grand Public, on n’est jamais allées à la Licorne, et on n’a fait aucune file sans badge.
Dernière astuce : faire une jolie pancarte et demander une invitation (petit papier bleu) ou une place (ticket sous forme de QRCode). Attention, si vous avez un billet, prenez en compte qu’il faut être accompagné de quelqu’un qui dispose d’un badge (vous êtes son +1, en somme). Certaines salles ne sont réservées qu’à la presse, mais si votre séance est au Grand Théâtre Lumière, pensez aussi à une tenue bien chic parce qu’en soirée, il y a le tapis rouge. Enfin, sachez que les gens sont quand même cool et qu’ils accepteront sans doute de vous “tenir la main” pour entrer dans la salle. Quant à la file de dernière minute, elle est autorisée pour les détenteurs d’un badge. Donc inutile d’arriver 1h30 à l’avance… Une petite demi-heure avant la projection, c’est largement suffisant. Personne ne veut un “no-show” sur son compte billetterie (car au bout de deux séances non honorées, vous risquez d’être banni). Et souvent, 1h avant la projection, annuler sa place équivaut à un no-show. Donc les gens courent filer leur billet à des passionnés, à la dernière minute.
Clairement, nous avons eu beaucoup de chance. Déjà, parce que deux de nos abandonnées, Pauline et Camille, sont tout de suite venues vers nous dès qu’elles avaient des billets supplémentaires à nous proposer. Surtout pour les sélections officielles, pour lesquelles nous n’avons aucun accès à la billetterie. A titre d’exemple, nous avons pu découvrir le film de Payal Kapadia, All We Imagine As Light, le soir de son avant-première (oui, on a fait le tapis rouge) ! Surtout, elles n’ont pas hésité à répondre présentes pour d’autres films. Par exemple, Pauline m’a accompagnée le dernier jour du Festival pour assister à deux séances : Emilia Perez et The Substances. Pendant que j'affiche ma jolie pancarte pour trouver une place, elle a agencé son planning pour venir découvrir les films avec moi et garantir ainsi mon accès. Et je peux vous dire que les files de dernière minute ce jour-là étaient interminables…
Enfin, pour assurer nos visionnages, il y avait une dernière chose à faire : la prospection en ligne, comme contacter les producteurs ou les agents de presse, notamment. Mais pour être honnête, c’est surtout la générosité de nos contacts sur place qui a le mieux fonctionné (et bon sang, on ne l'a pas vu venir !). Nous étions tellement persuadées que voir les films allaient être un challenge de taille, que cela allait nous demander beaucoup d’énergie et de patience, qu’on a complètement oublié le fait que nous étions entourées de personnes en or qui n’ont pas hésité une seule seconde à nous tendre la main pour relancer les producteurs (comme François Xavier, ami et traducteur, l’a fait pour le film Santosh), ou nous accompagner à des évènements... Bref, nous n’étions jamais seules.
Et vivre le Festival de Cannes avec des passionnés, c’est magique. Surtout qu’à la base, dans l’équipe, c’est Asmae qui est prioritaire sur les films. C’est elle qui se charge des critiques et qui a donc “l’obligation” de se rendre aux séances. Mais au final, nous étions souvent ensemble aux projections et ça, c’est grâce à eux. Merci infiniment.
Il y a les rencontres amicales, qui font chaud au cœur et donnent une nouvelle dimension à nos deux semaines. Et il y a les rencontres professionnelles. Comme l’année dernière, notre volonté est de montrer qu’il existe un média spécialisé sur le cinéma indien. Il y a des fans, en France, qui veulent en savoir plus sur les projets présentés, sur les artistes présents, et les différents évènements en rapport avec l’Inde qui se déroulent à Cannes. Mais notre point de rencontre ultime, le Pavillon Indien, ne nous est pas accessible. Du moins, il aurait dû nous être refusé dès le départ. En effet, sans badge, pas d’accès au marché du film et donc, au village international. Sauf que le premier jour, des membres du pavillon préviennent les vigiles que nous sommes autorisées à entrer. Par conséquent, les portes nous sont ouvertes pour ces 7 premiers jours. C’est un centre névralgique pour tout ce qui concerne le cinéma indien. Conférences, rencontres, présentations d'affiche ou de bande-annonce… Tout se passe ici. L’idéal pour agrandir nos réseaux, pour retrouver des visages familiers, pour se poser sur la terrasse entre deux courses, proposer des échanges…
Avec une première semaine très active et l'aide de Vanessa Bianchi pour mener des interviews supplémentaires grâce à ses contacts, nous avons réussi à interviewer pas mal de monde. Puis arrive la deuxième semaine : nouveau visage à la sécurité et un refus catégorique d’entrer qui tombe au pire moment (vous pouvez toujours écouter notre épisode bilan publié le 27 mai, qui revient sur le sujet). Sur le coup, ça fait mal. Puis ensuite, on relativise : la deuxième semaine, il ne se passe plus grand chose et de toute manière, les interviews peuvent avoir lieu ailleurs, de même pour les rencontres. Il faut donc se débrouiller autrement, être force de proposition et explorer la ville davantage. La magie des rues cannoises est toujours là : croiser un réalisateur dans un restau, un acteur à une séance ou à la sortie de son tapis rouge… ça arrive encore ! La preuve, la star télougoue Vishnu Manchu, qui était avec sa femme et le réalisateur Prabhu Deva, a d’abord cru que je voulais prendre des photos de lui pour les lui revendre après. Puis il est venu s’excuser de ne pas avoir compris qui nous étions lorsque Prabhu Deva a accepté de poser pour nous ! Mieux, il nous a même proposé de prendre une photo de nous avec Prabhu Deva ! Adorable.
Mais le truc, c’est que nous ne sommes pas encore assez à l’aise pour proposer des interviews dès la première rencontre. L’une comme l’autre, nous avons cette tendance à suivre notre instinct et à lire la pièce avant de tenter quoi que ce soit… Et si la personne ne semble pas disposée à discuter, pourquoi lui tomber dessus ? C’est peut-être une erreur de notre part, peut-être que nous devrions être plus audacieuses, mais nous avons beaucoup d’estime pour ces personnes et nous comprenons que Cannes peut aussi être aussi fatiguant pour eux. Hors de question pour nous de gâcher un moment de tranquillité…
Évidemment, pour les films en sélection officielle, le palais nous étant interdit (photocall, conférence de presse, interviews), certaines opportunités nous passent sous le nez, mais ce n’est pas grave ! Ce ne serait pas un Cannes OFF, si on avait accès à tout, n’est-ce pas ?
Maintenant que je suis posée pour écrire ce bilan, je réalise que j’ai des courbatures. Surtout dans les bras. Les ampoules aux pieds, le bas du dos qui tire, les jambes lourdes, les yeux éclatés… C’était déjà arrivé en 2023. Mais des courbatures dans les bras ?! La raison est simple : pour essayer de cliquer 2/3 photos, il faut être en alerte. Se positionner de façon à être le plus réactif possible - et pourtant, cette année, je ne l'ai pas toujours été !
A Cannes, les choses vont trop vite. Suivre le rythme est extrêmement compliqué, surtout si vous couvrez le festival dans son intégralité. C’est tout aussi complexe quand on ne s’intéresse qu’à une seule industrie. Parce qu’il y a du monde qui représente l'Inde pendant le Festival. Certains ne sont là qu’une journée, ou même quelques heures. S’organiser autour des plannings de chacun, c’est s’arracher les cheveux et souvent, prendre des décisions difficiles. Parfois, pour le cliché d’une personne, il faut annuler une séance ou rater une autre célébrité. Plus que de prendre des photos, c’est aussi l’occasion de se présenter, de saluer les personnes, de montrer que nous sommes là pour les soutenir (Merci Asmae pour sa belle voix, car j’ai beau tout donner, ça ne va généralement pas très loin).
C’est également l’opportunité de discuter avec les agents ou de négocier quelque chose. Mais cette année, ça n’est pas autant arrivé que l’année dernière et sans doute pour une raison simple : le focus sur les équipes des films présentés. Forcément, c’était notre priorité. Et puis une Kiara Advani, une Sobhita Dhulipala ou une Aditi Rao Hydari, elles ont tellement des agendas millimétrés que réussir à s’incruster relève du miracle.
Par contre, il y a des surprises inattendues qui sont propres au Festival. Comme l’agent presse qui était chargé d’accompagner les équipes d'Angenieux. Elle a vu notre travail et nous a fait confiance pour rencontrer l’immense Santosh Sivan et même mon actrice favorite : Preity Zinta. C’est quand même une sacrée milestone dans l’histoire de Bolly&Co et dans ma vie. Imaginez Shahrukh Khan en train de serrer la main de Deepika Padukone dans Om Shanti Om. J’avais beau afficher une attitude stoïque, à l’intérieur, c’était la panique la plus totale. Jamais je n’aurais imaginé que grâce à Bolly&Co, je la rencontrerais un jour.
Cette opportunité, c’est la preuve de notre professionnalisme et de notre notoriété en tant que média spécialiste du cinéma indien. C’est une forme d’encouragement, un boost pour la suite de Bolly&Co. Être présent à Cannes, c’est bien. Mais être invité à une cérémonie qui rend hommage à un cinématographe indien de renom comme Santosh Sivan, c’est la cerise sur le gâteau. Un moment qu’on n’oubliera jamais, au sein de l’équipe.
Parce qu'on ne va pas se mentir, avec l’accréditation presse, on avait le devoir de prouver qu’on méritait d’avoir cette reconnaissance. Par conséquent, on s’est peut-être épuisées à la tâche, en donnant tout ce qu’on pouvait tout en essayant de comprendre comment les choses fonctionnaient pendant le Festival. Et mine de rien, en se disant qu’on l’aurait forcément cette année, on était déjà prêtes à faire trois fois plus. Finalement, l’absence de ce joli badge nous aura permis de vivre le Festival autrement. De relativiser aussi. De prendre davantage notre temps également : pourquoi parler de tel événement, pourquoi faire telle interview, pourquoi prendre telle photo. Nous ne sommes que deux, il y a des limites quand même !
Surtout, vivre le Cannes Off nous a prouvé qu'on n'avait pas forcément besoin d’être adoubées par le Festival lui-même pour accomplir de belles choses. Oui, il y a indubitablement des obstacles, mais ça n’a foncièrement rien gâché à notre expérience. Et ça, ça nous a donné une force herculéenne pour tenir les deux semaines. Pour faire ce qu’on a toujours voulu faire avec Bolly&Co : partager notre passion pour le cinéma indien.
Puis surtout, c’est vous. Vous qui lisez ce texte même après avoir épluché nos vlogs ou avoir écouté 1h54 de podcast. Vous qui avez commenté nos contenus sur nos différents réseaux pour nous dire que ce que nous faisions, c’était bien. Vous qui n’avez pas hésité à venir nous aider quand nous en avions besoin. Vous, pour qui l’aventure Bolly&Co a commencé et continue d’exister. Quelle meilleure façon de finir ces deux semaines qu’en se disant qu’il est évident qu’on retournera à Cannes en 2025. Et qu’en plus, on va vous préparer une édition spéciale de Bolly&Co pour que vous retrouverez tous nos écrits et nos interviews exclusives dans un format magazine, comme à nos débuts en 2010.
Et évidemment, quelle merveilleuse année pour l’Inde et ses trois victoires : le Grand Prix de Payal Kapadia et le somptueux All We Imagine As Light (un moment historique !). Le prix d’interprétation féminine dans la sélection Un Certain Regard pour la géniale Anasuya Sengupta dans The Shameless. Et enfin le premier prix de la Cinéfondation pour le jeune réalisateur Chidananda S. Naik et son court-métrage Sunflowers Were The First Ones to Know (seul projet que nous n’avons pas pu visionner, et c’est bien dommage).
Que la 78ème édition soit tout aussi belle et riche, parce que cette deuxième année a mis la barre très haut !
Quelle naïveté !
Nous l’avons beaucoup répété (que ce soit dans le podcast Namaste Le Cinéma ou dans notre article sur l’Inde à Cannes en 2024), mais cette année, le challenge était de taille : aucun badge presse, aucune accréditation. Mais c’est mal nous connaître que d’imaginer deux fans de cinéma indien annulant leur venue pour un simple morceau de papier.
Surtout quand l’Inde tient une place si importante au sein de cette édition du Festival, toutes sélections confondues. Logement réservé, billet de train payé (très cher, évidemment), congés posés (ou congé sans solde négocié, sinon ce n’est pas drôle), nouvel appareil photo dans le sac et paire de sneakers enfilée, l’équipe était prête à affronter le fameux Cannes OFF. Le Festival de Cannes sans badge magique, où il faut faire preuve de patience et de créativité pour voir des films et rencontrer du monde.
Et comme je (Elodie, ndlr.) suis plus à l’aise à l’écrit qu’à l’oral (si vous avez écouté notre épisode bilan enregistré le dernier jour à Cannes, vous savez très bien de quoi je parle), il est de mon devoir de compléter tout ce qui a été dit par ce petit écrit.
Qu’est-ce que ça donne, le festival de Cannes sans badge ?
Le défi principal : voir les films indiens sélectionnés.
Pour un petit média comme le nôtre dont le focus est sur le cinéma indien, le Cannes OFF commence avant tout par une organisation de taille pour regarder les films présentés. La première découverte, c’est la billetterie du Festival pour le Grand Public, qui nous permet à 9h chaque jour de réserver les films en sélections parallèles (ACID, Cannes Cinéma, Quinzaine des Cinéastes et Semaine de la critique). Mais quand on sait que pour les pros, ça commence à 7h, autant vous dire qu’à 9h, il ne reste pas grand-chose.
La deuxième, c’est qu’il existe une accréditation avec la Quinzaine des Cinéastes. Formulaire de demande trouvé par hasard sur le site, nous recevons une réponse positive quelques heures plus tard. Avoir ce petit badge nous garantit une chose : la gratuité des films de la Quinzaine et la possibilité de réserver à 7h, comme les autres. Et ça tombe bien car il y a un film indien dans la sélection : Sister Midnight. C’est au moins ça de garanti !
Ensuite, les cinémas avec des accès pour les non-badgés. Nous en visons deux : la Licorne et Alexandre III (tous deux à 30 min à pied du logement, parce qu’on n’a plus la gratuité des transports garantie par le badge presse de l’année dernière). Fun fact : en deux semaines, grâce à la billetterie Grand Public, on n’est jamais allées à la Licorne, et on n’a fait aucune file sans badge.
Dernière astuce : faire une jolie pancarte et demander une invitation (petit papier bleu) ou une place (ticket sous forme de QRCode). Attention, si vous avez un billet, prenez en compte qu’il faut être accompagné de quelqu’un qui dispose d’un badge (vous êtes son +1, en somme). Certaines salles ne sont réservées qu’à la presse, mais si votre séance est au Grand Théâtre Lumière, pensez aussi à une tenue bien chic parce qu’en soirée, il y a le tapis rouge. Enfin, sachez que les gens sont quand même cool et qu’ils accepteront sans doute de vous “tenir la main” pour entrer dans la salle. Quant à la file de dernière minute, elle est autorisée pour les détenteurs d’un badge. Donc inutile d’arriver 1h30 à l’avance… Une petite demi-heure avant la projection, c’est largement suffisant. Personne ne veut un “no-show” sur son compte billetterie (car au bout de deux séances non honorées, vous risquez d’être banni). Et souvent, 1h avant la projection, annuler sa place équivaut à un no-show. Donc les gens courent filer leur billet à des passionnés, à la dernière minute.
La chance du débutant ?
Clairement, nous avons eu beaucoup de chance. Déjà, parce que deux de nos abandonnées, Pauline et Camille, sont tout de suite venues vers nous dès qu’elles avaient des billets supplémentaires à nous proposer. Surtout pour les sélections officielles, pour lesquelles nous n’avons aucun accès à la billetterie. A titre d’exemple, nous avons pu découvrir le film de Payal Kapadia, All We Imagine As Light, le soir de son avant-première (oui, on a fait le tapis rouge) ! Surtout, elles n’ont pas hésité à répondre présentes pour d’autres films. Par exemple, Pauline m’a accompagnée le dernier jour du Festival pour assister à deux séances : Emilia Perez et The Substances. Pendant que j'affiche ma jolie pancarte pour trouver une place, elle a agencé son planning pour venir découvrir les films avec moi et garantir ainsi mon accès. Et je peux vous dire que les files de dernière minute ce jour-là étaient interminables…
Enfin, pour assurer nos visionnages, il y avait une dernière chose à faire : la prospection en ligne, comme contacter les producteurs ou les agents de presse, notamment. Mais pour être honnête, c’est surtout la générosité de nos contacts sur place qui a le mieux fonctionné (et bon sang, on ne l'a pas vu venir !). Nous étions tellement persuadées que voir les films allaient être un challenge de taille, que cela allait nous demander beaucoup d’énergie et de patience, qu’on a complètement oublié le fait que nous étions entourées de personnes en or qui n’ont pas hésité une seule seconde à nous tendre la main pour relancer les producteurs (comme François Xavier, ami et traducteur, l’a fait pour le film Santosh), ou nous accompagner à des évènements... Bref, nous n’étions jamais seules.
Et vivre le Festival de Cannes avec des passionnés, c’est magique. Surtout qu’à la base, dans l’équipe, c’est Asmae qui est prioritaire sur les films. C’est elle qui se charge des critiques et qui a donc “l’obligation” de se rendre aux séances. Mais au final, nous étions souvent ensemble aux projections et ça, c’est grâce à eux. Merci infiniment.
Deuxième objectif majeur : les interviews.
Il y a les rencontres amicales, qui font chaud au cœur et donnent une nouvelle dimension à nos deux semaines. Et il y a les rencontres professionnelles. Comme l’année dernière, notre volonté est de montrer qu’il existe un média spécialisé sur le cinéma indien. Il y a des fans, en France, qui veulent en savoir plus sur les projets présentés, sur les artistes présents, et les différents évènements en rapport avec l’Inde qui se déroulent à Cannes. Mais notre point de rencontre ultime, le Pavillon Indien, ne nous est pas accessible. Du moins, il aurait dû nous être refusé dès le départ. En effet, sans badge, pas d’accès au marché du film et donc, au village international. Sauf que le premier jour, des membres du pavillon préviennent les vigiles que nous sommes autorisées à entrer. Par conséquent, les portes nous sont ouvertes pour ces 7 premiers jours. C’est un centre névralgique pour tout ce qui concerne le cinéma indien. Conférences, rencontres, présentations d'affiche ou de bande-annonce… Tout se passe ici. L’idéal pour agrandir nos réseaux, pour retrouver des visages familiers, pour se poser sur la terrasse entre deux courses, proposer des échanges…
Avec une première semaine très active et l'aide de Vanessa Bianchi pour mener des interviews supplémentaires grâce à ses contacts, nous avons réussi à interviewer pas mal de monde. Puis arrive la deuxième semaine : nouveau visage à la sécurité et un refus catégorique d’entrer qui tombe au pire moment (vous pouvez toujours écouter notre épisode bilan publié le 27 mai, qui revient sur le sujet). Sur le coup, ça fait mal. Puis ensuite, on relativise : la deuxième semaine, il ne se passe plus grand chose et de toute manière, les interviews peuvent avoir lieu ailleurs, de même pour les rencontres. Il faut donc se débrouiller autrement, être force de proposition et explorer la ville davantage. La magie des rues cannoises est toujours là : croiser un réalisateur dans un restau, un acteur à une séance ou à la sortie de son tapis rouge… ça arrive encore ! La preuve, la star télougoue Vishnu Manchu, qui était avec sa femme et le réalisateur Prabhu Deva, a d’abord cru que je voulais prendre des photos de lui pour les lui revendre après. Puis il est venu s’excuser de ne pas avoir compris qui nous étions lorsque Prabhu Deva a accepté de poser pour nous ! Mieux, il nous a même proposé de prendre une photo de nous avec Prabhu Deva ! Adorable.
Mais le truc, c’est que nous ne sommes pas encore assez à l’aise pour proposer des interviews dès la première rencontre. L’une comme l’autre, nous avons cette tendance à suivre notre instinct et à lire la pièce avant de tenter quoi que ce soit… Et si la personne ne semble pas disposée à discuter, pourquoi lui tomber dessus ? C’est peut-être une erreur de notre part, peut-être que nous devrions être plus audacieuses, mais nous avons beaucoup d’estime pour ces personnes et nous comprenons que Cannes peut aussi être aussi fatiguant pour eux. Hors de question pour nous de gâcher un moment de tranquillité…
Évidemment, pour les films en sélection officielle, le palais nous étant interdit (photocall, conférence de presse, interviews), certaines opportunités nous passent sous le nez, mais ce n’est pas grave ! Ce ne serait pas un Cannes OFF, si on avait accès à tout, n’est-ce pas ?
Patience et dos en compote, pour des photos originales.
Maintenant que je suis posée pour écrire ce bilan, je réalise que j’ai des courbatures. Surtout dans les bras. Les ampoules aux pieds, le bas du dos qui tire, les jambes lourdes, les yeux éclatés… C’était déjà arrivé en 2023. Mais des courbatures dans les bras ?! La raison est simple : pour essayer de cliquer 2/3 photos, il faut être en alerte. Se positionner de façon à être le plus réactif possible - et pourtant, cette année, je ne l'ai pas toujours été !
A Cannes, les choses vont trop vite. Suivre le rythme est extrêmement compliqué, surtout si vous couvrez le festival dans son intégralité. C’est tout aussi complexe quand on ne s’intéresse qu’à une seule industrie. Parce qu’il y a du monde qui représente l'Inde pendant le Festival. Certains ne sont là qu’une journée, ou même quelques heures. S’organiser autour des plannings de chacun, c’est s’arracher les cheveux et souvent, prendre des décisions difficiles. Parfois, pour le cliché d’une personne, il faut annuler une séance ou rater une autre célébrité. Plus que de prendre des photos, c’est aussi l’occasion de se présenter, de saluer les personnes, de montrer que nous sommes là pour les soutenir (Merci Asmae pour sa belle voix, car j’ai beau tout donner, ça ne va généralement pas très loin).
C’est également l’opportunité de discuter avec les agents ou de négocier quelque chose. Mais cette année, ça n’est pas autant arrivé que l’année dernière et sans doute pour une raison simple : le focus sur les équipes des films présentés. Forcément, c’était notre priorité. Et puis une Kiara Advani, une Sobhita Dhulipala ou une Aditi Rao Hydari, elles ont tellement des agendas millimétrés que réussir à s’incruster relève du miracle.
Par contre, il y a des surprises inattendues qui sont propres au Festival. Comme l’agent presse qui était chargé d’accompagner les équipes d'Angenieux. Elle a vu notre travail et nous a fait confiance pour rencontrer l’immense Santosh Sivan et même mon actrice favorite : Preity Zinta. C’est quand même une sacrée milestone dans l’histoire de Bolly&Co et dans ma vie. Imaginez Shahrukh Khan en train de serrer la main de Deepika Padukone dans Om Shanti Om. J’avais beau afficher une attitude stoïque, à l’intérieur, c’était la panique la plus totale. Jamais je n’aurais imaginé que grâce à Bolly&Co, je la rencontrerais un jour.
Cette opportunité, c’est la preuve de notre professionnalisme et de notre notoriété en tant que média spécialiste du cinéma indien. C’est une forme d’encouragement, un boost pour la suite de Bolly&Co. Être présent à Cannes, c’est bien. Mais être invité à une cérémonie qui rend hommage à un cinématographe indien de renom comme Santosh Sivan, c’est la cerise sur le gâteau. Un moment qu’on n’oubliera jamais, au sein de l’équipe.
Un Cannes Off, c’est clairement une édition sans pression (ou presque).
Parce qu'on ne va pas se mentir, avec l’accréditation presse, on avait le devoir de prouver qu’on méritait d’avoir cette reconnaissance. Par conséquent, on s’est peut-être épuisées à la tâche, en donnant tout ce qu’on pouvait tout en essayant de comprendre comment les choses fonctionnaient pendant le Festival. Et mine de rien, en se disant qu’on l’aurait forcément cette année, on était déjà prêtes à faire trois fois plus. Finalement, l’absence de ce joli badge nous aura permis de vivre le Festival autrement. De relativiser aussi. De prendre davantage notre temps également : pourquoi parler de tel événement, pourquoi faire telle interview, pourquoi prendre telle photo. Nous ne sommes que deux, il y a des limites quand même !
Surtout, vivre le Cannes Off nous a prouvé qu'on n'avait pas forcément besoin d’être adoubées par le Festival lui-même pour accomplir de belles choses. Oui, il y a indubitablement des obstacles, mais ça n’a foncièrement rien gâché à notre expérience. Et ça, ça nous a donné une force herculéenne pour tenir les deux semaines. Pour faire ce qu’on a toujours voulu faire avec Bolly&Co : partager notre passion pour le cinéma indien.
Puis surtout, c’est vous. Vous qui lisez ce texte même après avoir épluché nos vlogs ou avoir écouté 1h54 de podcast. Vous qui avez commenté nos contenus sur nos différents réseaux pour nous dire que ce que nous faisions, c’était bien. Vous qui n’avez pas hésité à venir nous aider quand nous en avions besoin. Vous, pour qui l’aventure Bolly&Co a commencé et continue d’exister. Quelle meilleure façon de finir ces deux semaines qu’en se disant qu’il est évident qu’on retournera à Cannes en 2025. Et qu’en plus, on va vous préparer une édition spéciale de Bolly&Co pour que vous retrouverez tous nos écrits et nos interviews exclusives dans un format magazine, comme à nos débuts en 2010.
Et évidemment, quelle merveilleuse année pour l’Inde et ses trois victoires : le Grand Prix de Payal Kapadia et le somptueux All We Imagine As Light (un moment historique !). Le prix d’interprétation féminine dans la sélection Un Certain Regard pour la géniale Anasuya Sengupta dans The Shameless. Et enfin le premier prix de la Cinéfondation pour le jeune réalisateur Chidananda S. Naik et son court-métrage Sunflowers Were The First Ones to Know (seul projet que nous n’avons pas pu visionner, et c’est bien dommage).
Que la 78ème édition soit tout aussi belle et riche, parce que cette deuxième année a mis la barre très haut !